On
ne reprochera certainement pas à Amalia de pécher par paresse: que
d’énergie et de curiosité chez cette gamine de quatorze ans qui
débarque à Londres seule et sans le sou, un jour de mars 1954! Il faut
dire qu’en rencontrant Victoria Brown – alerte octogénaire – à sa
descente du train, elle ne pouvait pas mieux tomber. Apprentissage de
la vie pour l’une, véritable renaissance pour l’autre, Station Victoria, d’Anne Cuneo, est l’histoire d’un double éveil et d’une amitié irremplaçable. …Le
roman, écrit à la manière d’un journal, nous transporte dans des
univers très britanniques: les courses de chevaux, les pubs et leurs
compétitions de fléchettes, ou le rock’n’roll qui envahit peu à peu les
clubs de jazz. Il y a l’apprentissage de la langue, aussi, des arts et
de l’histoire. Apprentissage de l’amour encore, pour cette adolescente
en quête d’une identité. Miss Brown, sublime conseillère – autant en
matière de sexe que de littérature –, nous plonge, elle, dans la
société victorienne de sa jeunesse, la grande époque des colonies. …Depuis 1984, Anne Cuneo avait abandonné la fiction pour des ouvrages documentaires, sur le théâtre notamment. Avec Station Victoria, elle nous donne à savourer une histoire vivifiante, merveilleusement bien documentée.
ISABELLE FABRICY, Le Matin
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