FRANÇOIS CONOD

LA REVANCHE DU CHEVAL FOU

Roman
2019. 104 pages. Prix: CHF 25.00
ISBN 978-2-88241-448-9


Biographie

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Livre énigmatique. Livre surprenant. Livre-fable? Qui pose la question de l’héritage du père. Comment se secouer de l’emprise d’un être autoritaire, voire tyrannique? «Mon père était un homme admirable. Il était abominable.»
On est dans les années 1925, au Dakota-du-Sud. C’est l’émergence du Ku Klux Klan et de ses terribles menées contre les Noirs ou tout ce qui n’est pas américain pur sucre. Qui ne se souvient des images terribles de ces fantômes à la haute cagoule et à la tunique blanche? Ils allumaient une croix latine qui ne se consumait point. Un jour, le héros assiste à la pendaison de deux Asiatiques. «Trop rapide, il n’y a pas beaucoup de spectacles.» Le lecteur est choqué devant l’insensibilité du jeune Borglum. Le père est l’un des grands manitous du KKK.
Le racisme croît, hydre monstrueuse. «Les nègres, métèques, chinetoques, bicots, youpins, cathos, pédés, communistes n’ont rien à faire ici. L’Amérique aux Américains!» Comment Lincoln Borglum peut-il proférer de telles insanités? Le racisme est dans sa sève, lourd héritage paternel. Il en rajoute une strate: «Il y a cinq sortes de singes humanoïdes: les gorilles, les orangs-outans, les bonobos, les chimpanzés et les nègres. Tous ont un point commun: ils puent. Imagine-t-on un Président noir?»
Ça c’est la face sombre de Lincoln, sculpteur mais qui n’a pas la notoriété du père. C’est lui, le père, qui à 60 ans, avec 400 ouvriers a sculpté la tête des quatre présidents dans le granit du Mount-Rushmore, colline sacrée des Indiens.
Lui, Lincoln sculpte des saints dans les églises. Se marie. Sans amour. Fait quatre garçons et une fille à sa femme. Il a des vélléités d’écrivain. Il n’écrira que des livres sur son père à Mont-Rushmore. Il a même rencontré Jean Tiguely à New York qui lui a confié: «Enfant, je n’étais pas heureux. Plus tard, j’ai compensé avec l’art. On fait de l’art quand on n’a pas été suffisamment aimé.» Lincoln meurt en 1986. C’est alors un dialogue posthume entre lui et sa sœur Mary Ellis.
L’écriture est rapide. Sans flonflons. Le sujet ne s’y prête guère. Le langage est cru parfois. L’humour noir, très noir. La Revanche du cheval fou de l’écrivain lausannois mort en décembre 2017 est paru ce printemps chez Bernard Campiche Éditeur.


ÉLIANE JUNOD, 
L'Omnibus,  18 octobre 2019

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«Oui, j'admire beaucoup mon père. S'il m'a amené (provisoirement j'espère) du Connecticut dans le Dakota-du-Sud, c'est dans l'intention d'étudier la possibilité de sculpter le Mont-Rushmore.»
Le père de James Lincoln de La Mothe Borglum (on l'appelle Jimmy) se prénomme John Gutzon (Gutzon pour tout le monde), né en Idaho, d'une famille de mormons (originaire du Danemark).
Les sculptures du Mont-Rushmore y représenteront les têtes gigantesques de quatre présidents américains: Georges Washington, Thomas Jefferson, Theodore Roosevelt et Abraham Lincoln.
De Borglum père et fils, François Conod fait des personnages d'un roman. Qui commence en 1927, en même temps que les travaux des statues monumentales du fameux Mémorial national de Keystone.
Jimmy admire son père, mais ne l'aime pas. Celui-ci est en effet un «tyran domestique», qui contrôle tout, «même les lectures»: Jimmy lit en cachette un livre (qu'il lui aurait «déconseillé»), prêté par son ami Chuck.
Jimmy n'aime pas les Noirs, comme son père, qui fait partie du Ku Klux Klan et l'a emmené, pour l'éduquer, encagoulé de blanc, à une de ses cérémonies secrètes, où sont pendus deux Asiatiques.
Gutzon meurt en 1941. Jimmy termine son grand œuvre presque achevé: «J’ai vingt-neuf ans. Maintenant, je suis marié. À une femme que je n'aime pas spécialement, mais qui a mis fin à mes tourments.»
Il voulait être ingénieur, mais est devenu sculpteur... Il est sévère avec ses enfants alors qu'il essaie d'être pour eux un meilleur père que ne fut le sien: «J’avais peur de lui bafouiller que j'avais peur. De lui.»
Mont-Rushmore était pour les Indiens la montagne des Six grands-pères, déflorée pour les quatre présidents. La Revanche du cheval fou sera, tout près, «la plus grande sculpture du monde», celle de Crazy Horse…
Jimmy aura exercé le même métier que son père parce qu'il avait peur d'être méprisé par lui. Mais il n'avait que du savoir-faire («Rodin avait du génie, Gutzon du talent») et ne savait pas ce que c'était que l'amour:
«Pour avoir mieux que du savoir-faire, il faut aussi de l’amour.»

Blog de
FRANCIS RICHARD

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Roman posthume de François Conod, La Revanche du cheval fou évoque surtout une relation père-fils, dans l’Amérique du XXe siècle…

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