Présence de la mort et hymne à la vie dans une ville des Pouilles
Après des études en Lettres à Lausanne, Laurent Koutaïssoff travaille
actuellement dans l’administration vaudoise. Il est l’auteur de
plusieurs livres et de créations théâtrales. Son dernier roman est bâti
sur deux destins, auxquels sont consacrés alternativement de courts
chapitres. Celui de Francesca, qui débute à Gallipoli en 1926. Et celui
de David, professeur d’histoire de l’art à l’Uni de Lausanne, qui
commence en 2018 par un drame: la mort de son jeune fils renversé par
un camion. Un moment très fort: le constat de reconnaissance du corps
que doit faire le père devant la police. Cette fin brutale va le mettre
dans un état de prostration et provoquer l’éloignement du couple.
Spécialiste de l’église Santa Maria delle Purità à Gallipoli, il décide
de se rendre dans cette cité des Pouilles pour s’y donner la mort.
Quant à Francesca, elle connaît un amour passionné avec son mari, le
pêcheur Beppe, qu’elle va perdre en mer, avant de connaître d’autres
deuils que le lecteur découvrira. Koutaïssoff peint un beau portrait de
cette femme courageuse, fière et noble, qui va affronter son destin.
Cela dans le cadre d’une petite ville du Sud de l’Italie très attachée
à son catholicisme, mais aussi à de nombreuses superstitions. La
vieille voyante Tina, qui lit l’avenir dans les cartes, joue d’ailleurs
un rôle important dans le livre. On notera que Gallipoli est d’origine
fin du roman. L’auteur dépeint avec talent l’atmosphère de cette cité,
connue pour ses pressoirs souterrains, celle de ses rues tortueuses, de
ses églises et processions, de son petit port de pêche. Par ailleurs,
l’Histoire n’est pas étrangère au roman. C’est le temps du fascisme,
avec ses ardents partisans du Duce dans la bourgeoisie locale. Puis
celui de la Seconde Guerre mondiale, avec le débarquement allié de 1943
et le bombardement des navires anglo-américains dans le port de Bari
par la Luftwaffe. Et peu à peu, David, au contact de Sabina, la fille
déjà âgée de Francesca, va renaître à la vie et accepter le décès de
son fils. Quant au sens du titre, on le découvrira vers la fin du
livre. Malgré quelques longueurs et un peu trop d’insistance sur les
états d’âme du Professore, le roman, bien écrit et aux personnages
crédibles, emporte l’adhésion du lecteur.
PIERRE JEANNERET, Le Courrier, jeudi 30 juin 2022
Une ville brûlante
En 1926, sur les pavés brûlants de Gallipoli, Francesca Badolati,
autrefois abandonnée et recueillie par le singulier Bartolomeo, croise
le regard de Giuseppe Barba, revenu au pays pour aider sa mère à la
mort de son père. Aussitôt, Giuseppe sait ce qui les attend. Mais il
ignore leur destin brutal, au-delà de la grossesse de Francesca, dite
la poverina, et de leur mariage. Des années plus tard, un professeur
d’histoire de l’art, confronté à une perte violente et douloureuse, se
rend à Gallipoli pour mettre fin à ses jours. Mais la présence de chats
noirs le met face à son passé et à son futur. Un texte ciselé, poétique
et sensuel autour de la douleur. Une façon brûlante de voyager dans les
Pouilles.
LAURENCE DE COULON, La Côte, mardi 28 juin 2022
«Les Chats noirs de Gallipoli»
Gallipoli, à l’extrémité du «talon» de la botte italienne, dresse face
au golfe de Tarente les murs mordorés de ses églises baroques et de ses
palais nostalgiques. Un décor de rêve pour un destin au bord du
gouffre, celui d’un homme qui porte l’art si haut qu’il a choisi ce
superbe écrin pour y mourir. Ou pas…
Renouant avec l’idée très latine d’un pouvoir sorcier des chats, les
noirs surtout, Laurent Koutaïssoff leur confie un rôle de
«Parques» à l’antique pour tirer les fils du présent et du passé. Car
dans cette cité brûlée de soleil, où tout se sait et se murmure, les
passions et les secrets sont adulés autant que maudits, donnant tout
leur sel à ce roman dépaysant, d’une âpreté élégante et poignante.
PAYOT LIBRAIRE
L’amour contre la douleur
Deux parcours de vie se rencontrent, alors qu’a priori rien n’était censé les rapprocher. Dans Les Chats noirs de Gallipoli,
Laurent Koutaïssoff explore les réactions et attitudes humaines face
aux drames de la vie, tant en 2018 que dans l’Italie de
l’entre-deux-guerres. Expert en histoire de l’art, un professeur
meurtri par le décès de son fils décide de se rendre à Gallipoli, ville
d’Italie du Sud qu’il connaît à travers ses travaux universitaires.
Huit décennies plus tôt, une histoire d’amour entre un jeune homme et
une enfant trouvée intrigue et passionne ses habitants.
Anéanti, l’historien d’art nourrit un funeste projet. C’est pour s’y
donner la mort qu’il fait ce voyage jusque dans les Pouilles. Mais le
hasard, ou le destin, vient rebattre en partie les cartes. Arrivé dans
cette petite ville du Salento, le professeur est amené à prendre
connaissance des tribulations des amoureux de l’entre-deux-guerres. Il
croise une fille de ce couple, laquelle, vieillie, n’a rien oublié de
ce que sa mère lui a raconté. Dès lors, l’universitaire jusque-là
englué dans un deuil problématique comprend qu’il est possible de tenir
bon. De ne pas céder à la tentation d’en finir. Jalonné de drames et
d’élans de solidarité, Les Chats noirs de Gallipoli
redonne vie à l’Italie d’autrefois sans laisser de côté le présent,
mettent l’accent à la fois sur la souffrance et sur l’importance de la
relation amoureuse.
MARC-OLIVIER PARLATANO, Le Courrier, vendredi 3 juin 2022
Mais pourquoi la passion de deux jeunes gens fascine-t-elle tant les
habitants de Gallipoli ? Les croyances et les superstitions côtoient
chaque jour la religion dans cette Italie du Sud de
l’entre-deux-guerres. Bien des années plus tard, la vie d’un professeur
d’histoire de l’art bascule, alors qu’il prépare un cours sur une
église de Gallipoli. Il se rendra dans cette petite ville des Pouilles
pour mettre fin à ses jours, mais des dizaines de chats noirs feront
rejaillir un passé résonnant comme autant d’oracles de sa propre
destinée.
Ce roman explore les souffrances et les réactions humaines face aux
drames de l’existence. C’est un double récit sur la relation amoureuse
et la douleur, qu’on affronte par l’instinct ou par la parole.
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