Lettre à Madame la libraire d’une petite prose à Boudry, canton de Neuchâtel, Suisse
C’est à la vingt-neuvième minute d’une émission de télévision de la
Radio Télévision Suisse Romande (RTS). Cela s’appelle la «Librairie
francophone», soit une version télévisée de ce qui était et est encore
un moment radiophonique, diffusée dans quatre pays (France, Belgique,
Canada, Suisse). Au fil de l’émission, des libraires expriment un coup
de cœur ou un coup de gueule à propos d’un livre qu’ils sont censés
avoir lu. Pour la dame en question, c’était ce 6 mai 2019, un coup de
gueule à propos du livre en deux volumes d’Elisabeth Horem. «Feu de
tout bois», parus aux éditions Bernard Campiche. Je cite: «C’est
vingt-cinq ans de sa vie, c’est son journal et puis jusque-là pourquoi
pas, c’est une auteure assez connue qui a eu pas mal de prix {sic} mais
le problème, c’est plutôt les 2’029 pages sur deux tomes. Et ça, moi,
je dis une chose à ce type d’auteur et à ce type d’éditeur, c’est pitié
pour les libraires qui lisent ce qui arrive et aussi pour les jurés des
prix littéraires parce que ça représente quand même dix livres à deux
cents pages… qu’on lira pas.» Fermez le ban!
Il serait un peu trop facile de répondre à cette dame sur le champ
qu’elle désigne elle-même comme le lieu de la bataille. On pourrait
évidemment dérouler une liste des chefs-d’œuvre qui ont le tort
définitif de dépasser les deux cents pages, en finissant, bien sûr, en
ultime coup de couteau suisse, par les 17’000 pages du Journal
d’Amiel. Absurde de supposer chez cette dame, cette ignorance de ce qui
fait le cœur battant de la littérature, c’est-à-dire son outrance, son
dédai des noms, sa surpuissance inconsciente. On pourrait donc sourire,
opter pour l’humour et l’accuser de discrimination à l’égard des
(livres) obèses. Mais ce n’est pas la maladresse d’une libraire qui
nous met tant en colère. Non, notre colère vient d’abord du fait qu’il
ne s’agit pas de n’importe quel pavé, mais d’un livre absolument
remarquable, écrit par une humaniste qui a effectivement évoqué
vingt-cinq ans de sa vie en deux volumes, ce qui est finalement assez
peu, quand on sait qu’elle a vécu en grande partie ce dernier quart de
siècle dans des villes aussi inflammables et fascinantes que Bagdad,
Damas ou Tripoli. Un livre qui tente de rendre compte d’une vie de
création et d’un monde aux prises avec ses démons complexes ne se
balaie pas, Madame, en mettant les rieurs de son côté. Feu de tout bois
vaut bien la bonne dizaine de petits livres de 100 à 200 pages que les
lobbys de l’édition vous mettent chaque mois entre les mains. Et puis
un journal, vous savez comme moi qu’il se butine, se parcourt, se
révèle à nous par petites touches choisies en fonction du temps qu’il
nous est loisible de lui consacrer. Moi, j’aurais plutôt profité de ce
quart d’heure warholien pour rendre hommage à l’éditeur, capable de se
lancer dans une entreprise aussi noble et généreuse que risquée. Mais,
plus que contre vous, ma colère, encore une fois, va vers ces objets
obscènes que sont la télévision et la radio, lorsque celles-ci
s’empressent d’offrir à quelques-uns des micros et des rires pour
toiser quelques autres. Car tous les gens du plateau de la «Librairie
francophone», présentateur en tête, se sont bien sûr esclaffés à votre
suite. J’ai repensé à toutes ces scènes d’humiliation et de pouvoir
(littéraires et vécues) où le savoir passe pour ridicule devant la
bêtise, le talent devant la suffisance, la poésie devant la propagande,
parce que les rieurs sont du mauvais côté. Un peu de respect, Madame,
pour ceux qui produisent des œuvres sincères, monstres, et nourrissent
ainsi l’humanité de leurs excès magistraux. Pour finir sur une note
plus drôle et me tenir un instant à la hauteur de votre intervention,
je dirais qu’effectivement, l’avantage des petits livres, c’est que
quand ils tombent des mains, ils ne nous cassent pas les pieds. Mais,
par chance, Madame, nos métiers valent mieux que ça, et nous ne sommes
là, ni vous ni moi, pour plaisanter.
CHRISTOPHE FOURVEL, Lettre à Madame la libraire d'une petite prose à Boudry, canton de Neuchâtel, Suisse. Revue Novo; 57. Rubrique Poussières de colère; 1.
Vingt-cinq ans de vie, huit domiciles – parfois dans des pays que
d’aucuns nomment «voyous» – des voyages à travers des contrées sauvages
et des civilisations anciennes alternant avec des retours vers la
famille et les lieux de ressourcement. Et comme fil rouge, l’écriture.
L’écriture créatrice des romans, et celle du journal, parallèle, qui
commente l’autre, s’interrogeant sur le travail en cours, doutant mais
toujours continuant.
La retraite venue pour son mari diplomate, Elisabeth Horem nous livre
ces quelque mille huit cents pages de notes quotidiennes, qui font
moins de place à sa vie pleine d’obligations protocolaires qu’aux
découvertes artistiques et humaines ainsi qu’aux événements tragiques
qui frappent les pays où elle réside. Dans la claustration sous haute
surveillance qui est la sienne par périodes, la page blanche devient
espace de liberté et l’écriture bouée de survie.
L’épaisseur des volumes de Feu de tout bois
ne doit pas être dissuasive, on peut piquer un «poste», Bagdad,
Tripoli, Damas, Doha… Mais quand on a commencé, on ne s’arrête plus, on
accompagne Elisabeth Horem partout, avide de partager la vie
extra-ordinaire d’un écrivain de haute plume.
FRANÇOISE FORNEROD, Journal du Cercle littéraire de Lausanne
Après un intermède en compagnie de l’écrivain Jean-François
Sonnay, j’avais hâte de reprendre le journal de l’auteur d’origine
bretonne. Et de la suivre dans l’évocation de la Syrie d’avant le
chaos. À la fin de l’année 2007, elle part avec son mari, nommé
ambassadeur à Damas. C’est dans la capitale syrienne qu’ils se sont
connus et qu’ils ont appris à aimer – passionnément – ce pays, ses
gens, sa lumière, ses lieux prestigieux tels que Palmyre, la citadelle
d’Alep, la mosquée damascène des Omeyades… «Notre chère Syrie est une
dictature sévère. Nous l’aimons, mais c’est un pays très brutal, un
drôle de mélange entre brutalité et civilisation.» Son mari a présenté
ses lettres de créance. «Le président, Bachar al-Assad s’est montré
cordial et ouvert.»
Et pourtant! «La Syrie, sous son apparence paisible, est au cœur d’une
poudrière. On pourrait l’oublier quand on se promène dans ce pays si
hospitalier.» On est en janvier 2008. À bord de leur voiture, ils
sillonnent le pays. «Des gens bavardaient sous leurs cerisiers. Ils
étaient la représentation même des douceurs de la paix, comme l’image
d’un paradis perdu qui rendait plus poignante encore l’idée de la
guerre.» Trois ans plus tard, ce pays où coulaient le lait et le miel
plonge dans l’horreur. En 2012, Micheline Calmy-Rey, alors cheffe du
département des Affaires Étrangères fait fermer l’ambassade. Le
prochain poste, ce sera Doha. Avec toujours, une oreille tendue vers la
Syrie, le cœur meurtri.
Doha, ses tempêtes de sable, la chaleur lourde, l’humidité, l’ennui
poisseux donnent une image implacable de ces pays du Golfe surgis du
désert et dont la richesse insolente laisse sur le bas-côté de la route
des travailleurs de l’ombre sous-payés, exploités, des femmes et des
hommes de seconde zone. Et que dire de cette société patriarcale où la
femme ne fait que de la figuration? Au Qatar, son mari est chargé
d’ouvrir une ambassade suisse. Elisabeth n’a qu’une envie, partir,
fuir. Alors seule ou avec son mari, elle s’évade parfois de longs mois.
Elle lit. Mais surtout elle tente de rassembler les esquisses de ce
roman dont l’écriture se dérobe. Elle ne sait pas encore quelle forme
prendra son récit. «Mer des ténèbres» va naître sous sa plume. Un livre
puissant. Écrit dans une langue magnifique.
Certes «Feu de tout bois» renferme quelques longueurs, pour qui ne
connaît pas les lieux qu’elle mentionne. Mais les descriptions sont si
vivantes que le lecteur qui a entrepris de lui emboîter le pas jubile.
La mer et ses sautes d’humeur, le ciel qu’elle a scruté sous tant de
latitudes provoque le ravissement. «Une végétation bouillonnante», «Le
Liban ocellé de neige», «Le lac brasille». La poésie adoucit des propos
parfois très durs.
Finalement ce sont tous ces détails, quelques-uns à première vue peu
signifiants qui rendent le quotidien de ces expatriés si présent.
Refermer le livre sur la 1078e page, c’est comme prendre congé d’amis
qui vous sont devenus chers.
ÉLIANE JUNOD, L'Omnibus, 22 février 2019
Feu de tout bois, journal d'une écrivaine qui a parcouru le monde
«Énoncer le flux du temps», tel est le propos d'Elisabeth Horem,
romancière française qui a séjourné dans une dizaine de capitales –
dont Bagdad en guerre – aux côtés de son mari, diplomate suisse.
L'intime aussi bien que l'exotique, les aléas du quotidien à Doha ou à
Berne de même que les belles rencontres, les moments de grâce
artistique alternant avec les tracasseries administratives, toute cette
pâte forme un mille-feuilles: le journal d'Elisabeth Horem, intitulé
"Feu de tout bois", qui relate vingt-cinq années d'une existence hors
norme entre 1992 et 2016.
Images et interrogations
Rien d'indigeste, pourtant, dans ces deux tomes de Feu de tout bois.
Ce journal nous fait pénétrer dans le cerveau et le cœur d'une
écrivaine assaillie de doutes pendant l'écriture de ses romans. On
entrevoit les coulisses du protocole diplomatique et l'on savoure la
visite du souk d’Alep.
C'est en passionnée de photographie que l'auteure restitue les détails
architecturaux d'une maison damascène, les dunes d'un désert traversé
ou les plats d'un dîner iranien. C'est en moraliste qu'elle s'interroge
sur son statut de femme de diplomate et en critique avisée qu'elle
partage ses bonheurs ou ses déceptions de lecture.
«Quand la vie est dangereuse, vous vous sentez beaucoup plus proche de
ceux qui vous entourent. Je n'avais pas envie de partir, j'ai pleuré
toutes les larmes de mon corps en quittant Bagdad, ce n'est pas si
simple.»
Elisabeth Horem, romancière
Hiérarchie versus terrain
La force des liens noués au fil des années et des capitales où elle a
séjourné inspire parfois à l'auteure des propos agacés sur les
décisions prises par ceux qui sont loin du terrain. Par exemple, à
propos de la Syrie: «Notre chef [...] n'aura pas montré beaucoup de
considération, c'est peu dire, pour le travail des ambassades».
Son commentaire au micro de la RTS sur le rappel de son mari à Berne en
août 2011, même si l'ambassade de Suisse à Damas restait officiellement
ouverte: «On l'a rappelé parmi les premiers, un petit peu vite parce
que le travail de diplomate, c'est aussi d'essayer de parler, même dans
des conditions difficiles, c'est le travail: de mettre aussi un peu les
mains dans le cambouis, serrer des mains qu'on n'a peut-être pas envie
de serrer mais qu'il faudrait continuer à serrer pour essayer peut-être
d'endiguer ce qui se prépare… sans doute que cela n'aurait rien changé
[...] disons, on laisse la porte ouverte à ce qu'on a vu maintenant: à
partir du moment où on est parti, eh bien, le régime peut reprendre sa
vieille image de paria, de tout est permis comme on a vu, c'est
terrible».
Feu de tout bois convie le
lecteur à cette «étrange expérience que de suivre pas à pas la vie
quotidienne d'un autre» selon les propres termes d'Elisabeth Horem: une
expérience littéraire, cosmopolite et citoyenne.
GENEVIÈVE BRIDEL, Site de la RTS
Quel plaisir, à l'automne, de découvrir le paquet Bernard Campiche
Éditeur! C'est un peu Noël avant l'heure. Il y a là six ouvrages, dont
deux très gros de neuf cent et mille pages. Cest une compilation de
vingt-cinq ans de de vie dans des lieux chargés d'histoire.
Née en Bretagne, Elisabeth Horem entreprend des études de lettres à
Paris. Épouse de diplomate, elle le suit dans les différents postes
auxquels la Confédération le mandate. Son journal s'ouvre sur leur
séjour à Prague. Il est surtout question de la lente gestation d'un
premier livre, de ses très nombreuses lectures. Le lecteur eût souhaité
davantage de confidences sur cette ville auréolée d'un riche passé. Ses
descriptions sont assez sommaires, à dessein puisque son travail
d'écriture occupe presque toutes ses pensées. «Le livre, il faut le
travailler, le retourner dans tous les sens, une espèce de respiration
artificielle du désespoir. Jusqu'à ce que l'on sente qu'il répond.»
À Paris, ils font halte pendant trois ans. Mais c'est surtout à Bagdad
que le journal «s'anime». Et pour cause! 2003 est l'année de la chute
de Saddam Hussein, ce tyran mégalomane. Images terribles et pitoyables
d'un vieux clochard qu'on a découvert dans un souterrain, aéré par un
tuyau. Dès lors, cette cité, qui fut la fleur de l'Orient, sombre dans
le chaos. Le réveil, c'est le bruit assourdissant des mortiers qui
s'abattent sur le quartier. Au fil des mois, la chaleur monte, la
tension devient insoutenable.
Le havre de paix, c'est le carré de jardin et cette piscine où
l'écrivaine se plonge avec délectation. La maison est surveillée nuit
et jour; blindée la voiture qui permet leurs déplacements. Se rendre à
l'aéroport, c'est comme jouer à la roulette russe. Et pourtant,
Elisabeth aime cette ville, les gens qu'elle côtoie.
Difficile de savoir de quoi sera fait le lendemain. Le quotidien à
Bagdad? Tenter de survivre! Les voitures piégées tuent et blessent. La
violence enfle comme une rivière en crue. Les enlèvements et les
assassinats sordides sont monnaie courante. Aussi est-ce une prouesse
d'organiser une soirée ou un concert. Étonnamment, l'auteure n’est pas
en proie à la peur.
Tripoli est la prochaine étape. Les contacts avec la population
libyenne sont sporadiques. Les invitations chez les ambassadeurs
rythment un quotidien monotone. Très vite, elle en a assez de ces
mondanités. Heureusement qu’il y a l'écriture! «Le journal est la
texture même de la vie.»
Les monceaux d'ordures le long d'une côte qui pourrait être belle
l'indisposent. Et c'est dans le désert qu'elle voit Khadafi, le
fantasque, enfourcher un cheval blanc à l'occasion du septième
anniversaire de l'Union africaine. Elisabeth vit dans l'attente. Celle
d’un nouveau poste. Son mari maîtrise l'arabe. Ce sera Damas.
L'écrivaine est un témoin privilégié de ces événements qui changent la
face du monde. Qui a lu les pages sur Bagdad n'en ressort pas indemne.
ÉLIANE JUNOD, L'Omnibus, 14 décembre 2018
Feu de tout bois est le journal qu'Elisabeth Horem a tenu pendant vingt-cinq ans au fil des voyages où elle a suivi son mari diplomate.
Y figurent, entre autres, ses notes de lectures diverses, ses
commentaires sur les villes où elle s'installe pour plusieurs années
(Berne, Prague, Paris, Bagdad, Tripoli, Damas, Doha, Rabat), des
considérations personnelles et ses réflexions sur le travail d'écrivain.
Il en résulte une somme de près de deux mille pages, malgré les
nombreuses coupures faites par l'auteure avant de publier ce journal;
que révèle-t-il de son parcours individuel et familial, de l'état du
monde, du statut de femme de diplomate, d'une vie d'observatrice, tout
simplement? (…)
SITE DE LA RTS à propos du passage d’Elisabeth Horem à «Versus-Lire», Espace 2, les 12 & 13 décembre 2018
Ce journal, qui couvre vingt-cinq ans de la vie d’Elisabeth Horem
(de 1992 à 2016), se divise en huit parties portant les noms des villes
où elle a vécu, au gré des différents postes de son mari diplomate.
La première partie, assez brève, est intitulée «Berne (1992-1996)» et
renferme essentiellement des réflexions sur ses débuts d’écrivain. À
partir de «Prague (1996-2000)» mais surtout de «Paris (2000-2003)», ses
notes cessent d’être circonscrites au domaine littéraire. Parallèlement
à des réflexions sur l’écriture, elles font une place toujours
croissante aux contingences de la vie quotidienne, à des récits de
voyages, à l’évocation de rencontres, à l’actualité, à des mouvements
d’humeur, à des impressions de promenades ou au temps qu’il fait, mais
aussi à des épisodes plus personnels.
Dans «Bagdad (2003-2006)», le lecteur retrouvera la matière de Shrapnels ainsi que l’essentiel du texte paru sous le titre Un jardin à Bagdad,
augmenté d’autres notes écrites à Bagdad et au cours des voyages faits
à cette période (entre autres au Yémen, en Syrie et en Turquie).
«Tripoli (2006-2007)» présente un tableau de la Libye de Kadhafi, avec
des scènes parfois cocasses de la vie des diplomates accrédités auprès
de ce leader fantasque et des impressions de voyages dans un pays alors
paisible.
La Syrie lui est chère, où elle avait été étudiante à la fin des années
soixante-dix. De nombreuses pages de «Damas (2007-2011)» sont
consacrées à des voyages en dehors du pays (en Éthiopie, par exemple)
mais aussi dans différentes régions de la Syrie, maintenant ravagées
par la guerre. On y assiste au début de la révolution, à la montée de
la violence et au désarroi des Syriens et de la communauté étrangère.
Son séjour au Qatar est relaté dans «Doha (2012-2015)». L’auteur y
livre ses impressions du pays et de la région, avec des récits de
voyages en Arabie saoudite, à Oman, en Iran. On y suit également
l’écriture de son dernier roman, La Mer des Ténèbres.
Enfin, la dernière partie: «Rabat (2015-2016)», outre des impressions de
la ville même, offre surtout le récit d’un long voyage fait à travers
le Maroc avant de s’installer en Bretagne où elle vit maintenant avec
son mari, ce qu’elle évoque dans l’épilogue de ce journal: «Le retour
(avril-décembre 2016)».
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