L’intérêt
de ce récit tient à la loyauté de l’écriture et du témoignage. Une
manière nette, un peu froide de dire les choses (Michel Campiche est
historien, auteur d’une Réforme en Pays de Vaud, en 1986) mais
aussi sensible, délicate, émue devant la beauté des paysages et la
qualité des êtres. Le Valais, qu’il découvre pendant les années de
guerre où la Suisse est séparée du monde, par un singulier privilège.
Il a vu l’Allemagne pendant un court séjour en 1939, avec ses parents.
Il pressent le danger terrible qui pèse sur ce pays: «Le matin du
départ, à cause de la catastrophe qu’ils sentent fondre sur eux, il me
semble que nous les abandonnons.»
L’Escale du Rhône,
période de libération pour le jeune homme, est avant tout un témoignage
d’admiration pour ses maîtres d’alors, ces chanoines tout abandonnés à
leur vocation d’enseignant. Tous ne sont pas admirables, bien sûr.
Campiche a souvent la dent très dure. Mais il sait parler de ceux qu’il
aime et il a le don du portrait. Par exemple, le chanoine Norbert
Viatte, qui enseignait la littérature française: «Sa voix prenait les
inflexions les plus délicates, elle exprimait jusqu’au dernier
mouvement de l’âme.» Le Valais, Lausanne, le culte darbyste, la
mentalité étroite d’une époque et d’un milieu. Il faut lire ce livre,
qui est un bel exemple de sociologie humaine.
GEORGES ANEX, Journal de Genève
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