…Le Piano du pauvre, la réédition d’un livre dans lequel une femme qui fut une artiste populaire, à Genève puis à Lausanne, raconte sa vie. …Denise,
orpheline de mère et de père au moment de son adolescence, avait des
dispositions sérieuses pour l’accordéon: à quinze ans déjà, en 1939,
par exemple, elle figurait en bonne place sur une affiche annonçant une
grande soirée musicale, littéraire et dansante à Genève. Elle fut
cependant contrainte de renoncer à parfaire sa formation pour devenir –
sur décision de l’autorité tutélaire – bonne à tout faire puis ouvrière
de fabrique; elle travailla même, par la suite, comme sommelière et fut
également placière en aspirateurs… …Denise Letourneur finira tout
de même par s’en évader. Lorsqu’elle put, enfin, reprendre l’accordéon,
dont elle jouait en virtuose, elle tint alors la vedette dans des
bistrots du centre le Lausanne, où elle était appréciée par les gens du
peuple, tenanciers et ouvriers, modestes employés, voire petits
fonctionnaires… Les
autres aspects de la vie privée de la narratrice imposent, tout autant,
la vision d’une femme marquée par les vicissitudes de l’existence; de
sérieux problèmes de santé s’ajoutant à des épisodes sentimentaux
navrants, elle apparaît ainsi comme la victime d’une société dure, peu
compatissante envers les faibles, fermée encore à la nécessité d’une
formation adéquate, pour les filles aussi.
Anne Cuneo transcrit avec beaucoup de tendresse et de sensibilité le récit de Denise Letourneur…
BERNARD VIRET, Journal de Sainte-Croix
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