Troublant, Le Chant du bosco, d’Élisabeth Horem, sort des sentiers battus et confirme un écrivain singulier.
Dans son quatrième roman, Élisabeth Horem choisit ses métaphores avec
goût. Sa prose souple et précise installe d’emblée une ambiance aussi
envoûtante que troublante qui gardera jusqu’à la fin sa part de
mystère. On ne sait pas dans quel pays l’on se trouve, qu’importe
d’ailleurs, juste que la ville dont il est ici question se nomme
Obronna et qu’un été, celui de l’attentat, elle fut «figée sous l’œil
fixe d’un soleil immobile», imposant alors que l’on garde
continuellement les volets fermés.
…Élisabeth Horem remplit progressivement certains blancs de l’histoire,
plaçant çà et là une nouvelle pièce du puzzle, mais pas toutes. Tout au
long de ce mince Chant du bosco,
elle promène ainsi son lecteur à travers un univers obsessionnel, le
temps d’une belle réflexion sur l’enfermement, la fuite sans fin.
ALEXANDRE FILLON, LivresHebdo
…Dans
ce nouveau livre aussi, tout part de presque rien: un train qui file
dans la nuit, trois silhouettes d’hommes aperçues par la fenêtre.
Aussitôt l’imagination (ou la mémoire) de Peter Vaart «s’est mise en
chasse, bête affamée rôdant sans cesse à la recherche d’un os à ronger». L’écriture
nette d’Élisabeth Horem emprunte au vocabulaire marin ses mots précis
et poétiques (le bosco désigne à bord le maître de manœuvre, donc une
sorte de frère de l’écrivain). Sans donner nul repère qui permette de
situer les lieux et les faits autrement qu’en sollicitant l’imagination
de ses lecteurs, elle tient la gageure de dénoncer toutes les
dictatures, à sa façon, c’est-à-dire en suggérant le pire sans jamais
hausser le ton. Cela grâce à la texture subtile d’un récit qui naît
sous nos yeux, parce que «tout reste à inventer».
ISABELLE MARTIN, Le Temps
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