La Fin des Bellini-Ponte, premier roman de François Conod, qui en impose demblée par sa fantaisie intelligente autant que par lintérêt des thèmes quil aborde, létoffe de ses personnages et son aptitude, bien rare chez nos écrivains, à ficeler un «montage» romanesque cohérent et captivant à la fois. En lan de grâce 1967, un jeune metteur en scène de théâtre suisse, Jacques Aliesne de son nom, fut engagé par le prince héritier du Monte-Grosso pour faire jouer Hamlet à la famille princière devant un parterre de têtes couronnées. Que la représentation en question nait jamais eu lieu, le public friand danecdotes mondaines se le rappelle évidemment. Plus mystérieuses en revanche sont restées les circontances dans lesquelles trépassèrent à lépoque le prince régnant Marco IV et son fils Renato, ainsi que la charmante Monica, trente-six mille fois plus intéressante ma foi que Caroline et Stéphanie réunies
Traitant avec autant dastuce intelligente que de sensibilité sinon toujours de légèreté stylistique les thèmes opposés de la séduction consommatrice et de lamour vrai, donc de lêtre et du paraître, de la comédie sociale et de ses soubassements intimes, François Conod nous offre, notamment, une suite de digressions pertinentes sur lhéritage de lesprit soixante-huitard, à égale distance des commémorations gâteuses et du reniement facile. Narquois et généreux, mordant et sensuel, son roman cousu dallusions ironiques et de clins dil cultivés, à la manière de Barilier, confirme un talent original dont on se réjouit de suivre lévolution, déjè remarquable.
JEAN-LOUIS KUFFER, Le Matin
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