Chacune de ces dix nouvelles dessine, en quelques pages, les
aléas de l’existence. Qu’il s’agisse du retour après un accident, de
l’enfer d’un chauffard miné par le souvenir, de jalousie ou d’un brutal
AVC que rien ne laissait prévoir, l’écriture est une des forces qui
aident à lutter pour survivre.
En filigrane, Lausanne impose son atmosphère qu’on sent nécessaire au
déroulement des événements et qui est magnifiquement rendu par l’auteur.
JULIETTE DAVID, Le Messager suisse
«Trois lettres assassines»
Sous la douceur, la violence. Sous la fragilité, la force. Et sous la
révolte, l’espoir. Daniel Tschumy signe un magnifique recueil de dix
nouvelles, parues aux Éditions Bernard Campiche, Place du Nord et autres lieux…
L’auteur y évoque des lieux et des voyages, habités par des souvenirs
et des rencontres. Il y parle aussi de blessures. Parmi celles-ci,
celle qui a été provoquée par «trois lettres assassines»: AVC, et qui a
projeté son épouse sur une «autre rive». L’écriture se charge alors de
douleur, de lucidité et de tendresse aussi. Pour dire la déchirure,
l’interminable souffrance, mais aussi la reconstitution encore fugace
d’une vie de famille.
CARINE FLUCKIGER, Fragile Suisse
Déambulations d’ici et d’ailleurs
Voici un recueil de dix récits où le narrateur essaie, à plusieurs voix
bien tempérées, de nous mener vers des espaces parfois proches, parfois
lointains, mais qui tous renferment une sorte de blessure énigmatique
comme point de départ. Parfois elle s’épaissit en question fondamentale
de vie ou de mort, de survie ou de résignation, parfois elle se dissout
en un sentiment de regret poignant. Aucun dialogue ne vient aérer leur
densité. Les récits s’égrènent avec une fluidité prenante. On est
irrémédiablement interpellé par ces voix qui racontent tel ou tel
événement avec un très perceptible besoin de mettre de la distance,
sans pour autant renier l’émotion qui le sous-tend. Par le biais d’une
langue visiblement soucieuse de sa tenue – et qui en a –, Daniel
Tschumy nous invite à suivre ces chemins qui s’avancent avec un souci
exacerbé de l’exacte formulation. On sent très bien qu’il y a là une
élaboration – au sens psychologique du terme – qui s’opère dans et
pr le langage. L’ancrage géographique y participe et le tout procède
par interrogations successives. Les lieux, comme l’indique le titre,
sont réels. L’on arpente des endroits qui ont littéralement vécu
d’avoir servi de décor aux divers accidents de la vie. Quant au
narrateur, il oscille entre différents rôles, si l’on prend les récits
comme autant de variantes possibles sur le thème de l’existence parfois
vacharde. Il est témoin ou victime, acteur ou simple observateur. Et
même si l’un des récits fait appel au surnaturel, ces rôles sont autant
d’attitudes existentielles qui permettent de revivre – envers et contre
tout!
Les Lettres et les Arts
Ces moments où la vie bascule
Les lieux nous révèlent, révèlent ce que nous sommes et avec quel
regard nous traversons la vie. Un café typique de Lausanne aux rideaux
défraîchis, une rue assoupie de Delhi sous un «ciel de mousson gris et
lourd», un hôpital aux murs blancs, autant d’endroits où s’écrivent et
se tournent certaines pages d’existence, pages marquées le plus souvent
par une cicatrice vive et profonde, qu’une mémoire cruelle se plaît à
remettre sans cesse à vif. Toutefois, les protagonistes du recueil de
nouvelles de Daniel Tschumy, «Place du Nord et autres lieux», ne se
laissent pas ronger par leurs blessures.
Chez eux, le temps et le travail des souvenirs parviendront à tracer un
chemin qui aboutira peut-être à l’apaisement: confrontation sur un banc
de la Riponne, plus de trente ans après le drame, avec l’ami d’enfance
qui avait saccagé si cruellement une belle histoire commune; aveu d’un
chauffard, grâce à l’écriture rédemptrice, de l’accident qui a causé la
mort d’un jeune homme innocent, un après-midi de juin plein de
promesses; début d’acceptation de son mal par une mère devenue
hémiplégique à la suite d’un accident vasculaire cérébral, malheur jeté
dans une famille qui voit tout à coup brisé net son droit au bonheur.
Une atmosphère intimiste pour capter avec finesse ces moments où la vie
bascule, sans crier gare. Que ce soit à Chicago, Lausanne ou Bali,
fragile est le lien qui nous relie à l’existence.
ANNE MOOSER, La Liberté
Heureuse découverte que le dernier livre de Daniel Tschumy récemment paru chez Bernard Campiche Éditeur. Place du Nord et autres lieux
contient dix nouvelles ayant pour décors l’un ou l’autre quartier de
Lausanne. Dix histoires ordinaires, parfois légères, souvent graves,
qui pourraient paraître banales mais qui se révèlent toujours uniques
sous le regard aiguisé de l’auteur. Tous ces courts récits ont ceci en
commun qu’ils s’articulent autour d’un évènement – souvent une blessure
ou une attente – qui vient changer le cours d’une existence.
Ainsi en est-il de «La chambre d’Eric». Trois anciens camarades du
collège de Béthusy se donnent rendez-vous un vendredi en fin
d’après-midi sur un banc de la Riponne pour évoquer un épisode de leur
enfance. Le mauvais tour joué à l’un d’entre eux a marqué leurs
destins, chacun de manière différente mais profonde. Bien des années
plus tard, cette rencontre leur permet de renouer les fils de leurs
parcours et de laisser le passé se refermer sur cette ancienne fêlure.
Avec «Les eaux de la mer», un vieillard, terrassé par le remord, confie
dans un cahier le lourd secret qui le ronge. C’est lui le chauffard
qui, quelques années plus tôt, a fauché un jeune homme Place du Nord
avant de prendre la fuite. Cet aveu tardif, obtenu au terme d’un
difficile processus d’écriture, provoque en lui un allègement, le début
d’un apaisement intérieur.
Le récit le plus fort et le plus bouleversant du livre est sans
conteste celui de cette jeune mère de famille victime d’un accident
vasculaire cérébral. Ces «Trois lettres assassines» (AVC) témoignent
avec beaucoup de sensibilité et de justesse de la cruelle descente aux
enfers, de la vie injustement ravagée, des souffrances, du dévouement
du personnel soignant, de l’espoir et de la révolte. Cette nouvelle se
continue par «Home» qui relate le difficile retour dans l’environnement
familial, le long et cahoteux travail de réhabilitation, le combat
quotidien contre les limites du handicap et pour la sauvegarde de la
relation avec les deux petites filles de la famille.
Daniel Tschumy témoigne d’un sens aigu de l’observation des lieux et
des gens. Ses descriptions sont précises, minutieuses même. On sent un
regard attentif et le souci de restituer les choses telles qu’elles
sont. Pour cela, son écriture est travaillée, le détail est soigné,
parfois jusqu’à une certaine préciosité. Cette maîtrise du langage et
l’exactitude des portraits confèrent à Place du Nord et autres lieux
un réalisme puissant. Les dix nouvelles sont l’occasion de belles
rencontres avec des personnages vrais et des situations marquantes qui
prennent une actualité supplémentaire en s’inscrivant dans le cadre
connu de la Place du Nord, des tours de Valmont, de la colline de
Montriond ou de tant d’autres lieux familiers de la capitale vaudoise.
Né en 1964, Daniel Tschumy a étudié les lettres à l'Université de
Lausanne et enseigne au gymnase de la Cité. Il est l’auteur de poèmes
et de récits de voyage.
VINCENT HORT, La Nation
Un autre? Des autres. Cet homme par exemple qui revient sur
les lieux du passé et y trouve une femme prête à squatter sa vie. Cet
autre que hante le souvenir d’un accident inavoué. Il y a celui qui est
parti chercher à Delhi un destin qui l’attendait au coin de sa rue… Il
y a même des femmes, et d’une jolie finesse! Vagabondant place du Nord
et autres lieux, la plume de Daniel Tschumy fait de très belles
rencontres, fortes dans leur banalité, légèrement décalées pourtant,
qui toutes traînent dans leurs plis des bribes de souvenirs douloureux
malgré leur volontaire désinvolture.
JOËLLE BRACK, Edelweiss, Payot Libraire
Déambulations intérieures sur la Place du Nord et autres lieux
Le Lausannois Daniel Tschumy
confronte des êtres ou des fantômes à une blessure qu’ils pansent par
la parole ou l’écriture. Et qui se réinventent
Place du Nord, à Lausanne. L’écrivain, comme le peintre, le
réalisateur, le photographe, isole les lieux, les lumières, les êtres,
pour transmettre, dire, aller ailleurs, au-delà. Daniel Tschumy a posé
son regard d’écrivain sur la place du Nord à Lausanne. Dans la nouvelle
qui porte ce nom et qui donne le titre au recueil, on se dit que ces
mots-là, Place du Nord, résonnent d’une vibration particulière,
porteuse d’échappées encore possibles ou déjà hors de portée. On se dit
qu’il fallait écrire sur cette place avec un nom pareil, à la fois si
banal et si ouvert sur le large. Mais ce sont bien les mots de
l’écrivain lancés tel un filet qui éclairent cette petite place anodine
de Lausanne et la transforment en personnage, en matière vive où les
phrases se déposent et ouvrent des voies, ralentissent le regard et
même le temps. Avant Place du Nord, Daniel Tschumy a publié trois recueils de poèmes et deux récits.
Lausanne, ses rues, ses places, ses cafés sont peints à plusieurs
reprises. La citation de Philippe Delerm, en exergue du recueil,
résonne au fil des pages: «Pour connaître le vrai plaisir de la rue,
mieux vaut faire partie des regardants. À l’ombre ou au soleil.»
L’auteur sait sans doute se perdre dans l’observation diurne et
nocturne de sa ville et ses personnages comportent peut-être des
éclats, des traits entraperçus sur un trottoir ou une place.
Dans chacune ou presque des dix nouvelles qui composent Place du Nord et autres lieux, des êtres ou des fantômes se confrontent à une blessure, un souvenir,
une vision, qui tranche leur vie en deux, un avant et un après. Cette
découpe, qui sous-tend le récit tel un moteur silencieux, est
travaillée de multiples façons. Plusieurs nouvelles se présentent en
binôme, un même récit étant raconté par des protagonistes différents.
Le plus souvent, la confrontation à l’événement permet un apaisement,
même diffus, un accroissement de l’être, du courage. Et souvent, les
mots ou la parole sont le viatique pour poursuivre la route.
Parfois, Daniel Tschumy joue des tours au lecteur qui croit reconnaître
des situations pour s’apercevoir en cours de route qu’elles étaient
d’un autre ordre. Comme dans «Un crime délicieux»: une femme, Camille,
attend dans un café. Le narrateur extérieur donne d’abord l’impression
de n’être là que pour elle, décrivant la scène par ses yeux et ses
humeurs. Camille regarde à la dérobée une autre cliente, élégante, qui
boit un verre de vin. Camille attend impatiemment quelqu’un, objet d’un
vif amour. Le lecteur aura deux surprises: l’identité de la personne
attendue et la «trahison» du narrateur qui passera, avec l’aisance
d’une contre-plongée de cinéma, dans la tête de l’autre femme qui ,de
regardée, deviendra regardante. D’autres fois, le trouble est mis dans
la personne même du narrateur, comme dans «Place du Nord» où un homme
doté d’une capacité aiguë à ressentir les vibrations de la rue, des
cafés et des êtres raconte à la première personne son retour dans son
ancien appartement.
Qu’il s’agisse de cet homme de la place du Nord; du vieil homme, rongé
par un secret dont il veut se décharger par écrit; de Luc, qui invite
un ancien ami d’enfance à le retrouver sur un banc, place de la
Riponne, à Lausanne toujours, pour évoquer une trahison ancienne; ou
encore de l’apparition d’un enfant dans une rue de Delhi, un
15 août, jour de l’Indépendance indienne, Daniel Tschumy impose un
rythme à la lecture, une intensité dans l’analyse des situations, des
chocs et contre-chocs, infimes ou majeurs. Récits de transformation, de
réinvention, ils se donnent à voir, à vivre dans la matière même des
phrases.
Le recueil se termine par «Trois lettres assassines» et «Home». Les
trois lettres désignent les initiales AVC, accident vasculaire
cérébral. Rupture majeure, cauchemardesque, entre la vie d’avant et
d’après. Nadia, maman de deux petites filles, éducatrice vive et
gracieuse, s’écroule à la maison, un calme dimanche de novembre 2008.
La traversée de son enfer pour revenir, lentement, à la vie est
racontée par son mari, debout mais «dévasté à l’intérieur». «Home» suit
le retour, éprouvant, à la maison. Il s’agit alors, pour le narrateur,
de s’éloigner du refuge de l’écriture, d’éteindre l’ordinateur et
d’aider sa femme «à retourner le plus loin possible dans le monde».
LISBETH KOUTSCHOUMOFF, Le Temps
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Dix
nouvelles, variations sur le thème de la blessure. Culpabilité, échecs
personnels en tous genres, accident foudroyant, aucun personnage n’est
ici à l’abri. Ce vieil homme par exemple, qui tente d’expier sa faute
entre les murs de son institution. Ou alors ces deux femmes, vivant
l’une son attente impatiente dans le coin d’un café, l’autre ses
ultimes instants de bonheur en habillant sa fille. Mais derrière la
blessure pointe une force, révolte ou résistance, qui va rendre
possibles différentes formes de renouveau, au-delà du remords, de la
solitude, du handicap peut-être. Route ardue, où la parole est une
alliée précieuse, qu’elle soit échangée sur un banc public ou couchée
par écrit. Des présences offrent également leur baume – amie retrouvée
après une longue absence, enfants surgissant çà et là pour empêcher
leurs aînés de stagner. Sans oublier une galerie de décors, lausannois
la plupart, dont l’alchimie particulière imprègne les acteurs. Comme si
leur chemin devait emprunter ce lieu précis – colline, place, quartier
– à l’exclusion de tout autre, forcément plus fade, moins riche en
vibrations…
DANIEL TSCHUMY
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