Passage de Marie-Claire Gross à l'émission radiophoonique «Versus-lire» Espace 2, du 15 novembre 2018.
Aussi haletant que la course
Le roman 5 minutes 44 de
Marie-Claire Gross est un des derniers livres édités par Bernard
Campiche. Même histoire, trois points de vue: celui d’un journaliste
sportif, Cassoni, de l’entraîneur de la marathonienne suisse, Victor,
et Frank, un employé de sponsors. La course est celle du premier
marathon olympique féminin du 5 août 1984 à Los Angeles, l’histoire est
véridique. Les femmes ont longtemps été interdites de courir, mais,
petit à petit, elles ont réussi à imposer cette discipline.
Le lecteur suit la course avec les trois protagoniste, on se croirait
dans un film documentaire; il y a beaucoup de détails très précis qui
nous font revivre cette course d’une manière très réelle, avec du
suspense. Frank et sa femme Irène sont fans de la Norvégienne Grete
Waitz et il doit lui ramener le plus de photos possible. Pas si facile,
car ce n’était pas encore l’ère du numérique.
Cinq très longues minutes de la vie d’une coureuse
Marie-Claire Gross, pour ce sujet, s’est documentée de manière précise.
Elle est venue discuter avec Pierre Mercier de son travail de
commentateur sportif. On voit qu’elle connaît très bien ce domaine et
le raconte d’une manière très réelle. Il y a le suspense de la course,
est-ce Grete Waitz ou Joan Benoit l’Américaine qui va gagner? Ensuite,
la marathonienne suisse, Gabriela Andersen-Schiess, va-t-elle réussir à
finir sa course? Elle a raté un poste de ravitaillement et arrive
complètement désydratée pour les derniers tours du stade. C’est vrai
que l’image de cette coureuse qui titube tenue par sa seule volonté
m’est immédiatement revenue à l’esprit. Pourquoi ce titre 5 minutes 44?
On ne le sait formellement que vers la fin, même si on peut le deviner
petit à petit. Cinq minutes, c’est très court ou c’est très long selon
les circonstances, selon le ressenti.
Un livre qui se lit très facilement, très intéressant également du point de vue de la place des femmes dans le sport.
NATACHA MAHAIM, L'Omnibus, 9 novembre 2018
Passage de Marie-Claire Gross à l'émission radiophoonique «Vertigo» La Première, du 21 décembre 2018.
Chaleur et suspense étreignent le deuxième roman de Marie-Claire Gross. 5 minutes 44
se déroule à Los Angeles il y a trente-cinq ans. Le monde avait alors
les yeux rivés sur la Cité des anges qui accueillait les Jeux d’été.
L’intrigue se focalise sur le dimanche 5 août 1984. Trois regards s’y
déploient en alternance sur la même épreuve. Et quel événement!
Il s’agissait d’une première: le marathon olympique féminin.
La narration restitue de façon évocatrice la canicule qui accablait Los
Angeles et influencera la suite. Marie-Claire Gross rend également le
gigantisme de la mégapole. En cette ville immense, les marathoniennes
ont pris le départ sous une pression très forte: les féministes ont dû
lutter pour obtenir le droit de courir des marathons, jusque-là
réservés aux hommes.
Un chronométreur, le coach d’une athlète et un journaliste sportif
suivent l’épreuve. Le personnage principal est en revanche une femme,
Gabriela Andersen-Schiess, une athlète suisse dont on attend l’arrivée.
L’incertitude et l’inquiétude qui montent nourrissent le suspense. Les
tribulations de l’athlète, vues et revues sur le petit écran à
l’époque, donnent sa force dramatique à 5 minutes 44.
Jusqu’au franchissement de la ligne d’arrivée par une Gabriela
Andersen-Schiess à bout de forces, qui aura mis 5 minutes 44 secondes à
boucler un ultime tour de stade en titubant. D’un fait marquant entré
dans la mémoire collective. Marie-Claire Gross tire un roman palpitant,
aventure sociale, politique et humaine.
MARC-OLIVIER PARLATANO, Le Courrier, 3 janvier 2019
Un dernier tour de piste
5 minutes 44, c’est le temps que mettra Gabriela Andersen-Schiess pour
son dernier tour de piste, long comme un calvaire. Du premier marathon
féminin des JO, couru à Los Angeles en 1984, l’histoire retiendra moins
le nom des médaillées que cette image forte: la coureuse zurichoise
titubant, déshydratée, d’un couloir à l’autre, pour s’effondrer dans
les bras des médecins juste après la ligne… 5 minutes 44,
c’est aussi le titre de la Boélande Marie-Claire Gross, qui s’empare de
cette séquence en la situant dans le long combat des femmes pour le
droit à la course à pied de compétition.
La littérature a souvent enfilé ses baskets, du Courir d’Echenoz à l’Autoportrait de l’auteur en coureur de fond
de Mukami. Mais parfois, difficile de tenir le rythme. Même si les
pages qui évoquent l’entrée dans le stade du dossard 323 sont très
réussies, l’auteur s’éparpille en superposant les points de vue d’un
journaliste, d’un entraîneur et d’un préposé au chronomètre. Surtout,
son texte parfois malhabilement féministe reste trop proche de sa
documentation pour aspirer à la fluidité d’une foulée marathonienne.
THIERRY RABOUD, La Liberté, 15 novembre 2018
Ce dernier tour de piste entré dans l’histoire
L’image, effrayante, est restée célèbre: à l’arrivée du marathon
féminin des jeux Olympiques de Los Angeles, Gabriela Andersen-Schiess
titube, les yeux perdus, le corps désarticulé, le visage tordu. Elle
finit sa course – son calvaire – et entre dans l’histoire du sport. La
voici au coeur du deuxième roman de la Vaudoise Marie-Claire Gross
(après Relier les rives en 2016): son titre, 5 minutes 44, renvoie au temps qu’il a fallu à l’athlète helvético-américaine pour effectuer son dernier tour et demi de piste.
Ce 5 août 1984, les jeux Olympiques accueillaient pour la première fois
un marathon féminin. Marie-Claire Gross retrace cet événement à travers
trois personnages masculins: un employé de Timing, l’entraîneur de
Gabriela Andersen- Schiess et un journaliste sportif. Le sujet lui
permet aussi de revenir sur cette époque où les femmes ne pouvaient
courir, parce que ce n’était pas bon pour elles. On pensait à leur
bien, que voulez-vous… 5 minutes 44 repose sur une documentation
sérieuse et une évidente connaissance du sujet, qui ne devient jamais
pesante. Au contraire: le livre laisse parfois l’impression de rester
en surface. Il évoque certes des thèmes passionnants autour du sport,
des luttes féministes, du courage, de la souffrance, de la
médiatisation, mais il les effleure plus qu’il ne les approfondit.
ÉRIC BULLIARD, La Gruyère, 15 novembre 2018
Ce
dimanche 5 août 1984, à Los Angeles, a lieu le premier marathon
olympique féminin de l'Histoire. Le départ est donné à Santa Monica et
l'arrivée est prévue dans un stade immense, de 80 000 places, le
Memorial Coliseum.
Marie-Claire Gross raconte donc une histoire vraie, mais c'est un
roman, certes très documenté, mais un roman tout de même: cette
épreuve, au sens littéral du terme, est vécue depuis trois points de
vue masculins imaginés.
Frank est employé de Timing: «Ses premiers Jeux Olympiques, il a la
chance de les vivre de l’intérieur.» Son rôle est de «s’assurer que les
noms d'Omega et Longines figurent dans la ligne des caméras.» Lui et sa
femme Irène, restée en Suisse, sont fans de l'une des cinquante
participantes, la Norvégienne Grete Waitz.
Victor est l'entraîneur de la marathonienne suisse Gabriela
Andersen-Schiess, qui, à l'époque, a trente-neuf ans. Gaby est une
femme de caractère, à qui il est difficile d'imposer quoi que ce
soit... Il fait très chaud et très humide. Il ne laisse pas de
lui répéter: «Vergiss nicht zu trinken» (N'oublie pas de boire).
Cassoni est journaliste: «Lui, il aime le chaud: l'été va si bien aux
filles.» Il trouve qu'un marathon femmes est une fausse bonne idée:
«Qu’est-ce qui leur prend à vouloir copier les hommes? On n'est pas
fait pareils.» En plus il a commencé en retard... ce qui va lui faire
manquer des épreuves bien plus intéressantes.
Le mieux serait de ne pas connaître les résultats de ce marathon
mythique (ou feindre de les ignorer), où des femmes ont montré que,
sans copier les hommes, elles étaient des athlètes suscitant
l'admiration de toutes et de tous.
Car l'auteure, qui connaît son sujet sur le bout des jambes de ses
marathoniennes, fait de cet événement une histoire pleine de suspense,
donnant envie au lecteur d'en connaître la fin, même s'il la connaît,
en excitant son impatience.
Quant au titre du livre, il n'est compris par le lecteur que vers la
fin: dans une épreuve où le chronométrage est essentiel, ces cinq
minutes et quelque apparaissent à la fois longues et courtes, comme
pour ceux qui les ont vécues.
Blog de FRANCIS RICHARD
Évoqué dans Sport dimanche, RTS 1, le 28.10.2018.
5 minutes 44,
son deuxième roman, met en scène trois hommes : un employé du Timing,
l’entraîneur d’une athlète et un commentateur sportif engagés dans les
Jeux olympiques de Los Angeles.
Nous sommes le 5 août 1984, jour du premier marathon olympique féminin.
Quelle est la place des femmes dans la société et surtout dans le sport
? C’est l’une des questions qu’aborde ce roman nourri d’archives, aux
accents de docufiction.
Observateurs actifs, Frank, Victor et Cassoni vont assister et faire
écho, chacun à sa façon, à un événement dramatique et spectaculaire
ancré dans la mémoire collective.
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