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JACQUES-ÉTIENNE BOVARD

La Pêche à rôder

2009. 200 pages. Prix: CHF 14.–
Texte intégral de l’édition originale (2006), mais sans les photographies
ISBN 2-88241-230-0, EAN 9782882412300

Cet ouvrage est disponible en édition numérique (sans les photos), au prix de CHF 10.00,
auprès de notre diffuseur suisse, l'OLF. ISBN 978-2-88241-347-5




Biographie

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Il y a en Suisse, quelque part dans le canton de Vaud, des montagnes, des rivières, des poissons vigoureux et l'écrivain Jacques-Étienne Bovard qui nous donne à lire un livre intimiste qui  interroge ce que nous sommes.
 
«...enfin elle consent à la replonger dans l'eau face au courant, et à desserrer les doigts jusqu'à ce que sa proie lui échappe
 comme une petite torpille éclaboussante»,
Jacques-Étienne Bovard, La Pêche à rôder.
 
L'auteur, arrivé à l'âge d'homme, se promenant avec sa petite fille à la main au bord d'une rivière — la Venoge —  se remémore patiemment toute l'histoire de ce qu'il était jadis. La pêche l'a sauvé et les souvenirs reviennent par vagues, et l'écrivain qu'il est devenu ne peut s'empêcher de l'écrire en toute vérité. Et l'auteur de s'interroger, est-ce vraiment sérieux de parler de pêche quand on est un écrivain raisonnable, établi, reconnu? C'est en cela que son livre est passionnant car Jacques-Étienne Bovard le fait honnêtement. La pêche fut sa thérapie et maintenant son étendard, et peu lui en chaud que cela fasse sourire. Le temps des vieilles caricatures de Daumier, des moqueries rances et hautaines d'un Maupassant sont désuètes, on aimerait nous aussi qu'elles soient définitivement éteintes, réduites en poussières, transformées en matériaux pour historiens du prochain millénaire. Jacques-Étienne Bovard est bien plus du côté d'un Hemingway, de Jim Harrison et de Charles Ritz, de la grande littérature de pêche et des grands pêcheurs. En ce sens, il fait se joindre la pratique halieutique et la littérature, cicatrise ainsi la césure entre ces deux pratiques, ce que les Américains n'ont jamais connu, les bienheureux!
La rivière amène aux retrouvailles de l'enfance, à ses premières sensations de liberté immense, d'aventure joyeuse et de ruse espiègle. L'auteur le souligne dans les premiers chapitres où la pêche fut son refuge et même son école. À l'école, celle du tableau noir, il est un cancre, gentil certes, avec «peut mieux faire» ou «poursuivez vos efforts sans vous décourager» inscrits sur son bulletin. Un cancre désemparé devant la discipline scolaire et l'attente des parents socialement bien installés. Mais, comme André Dhôtel dans le Club des cancres (merveilleux écrivain), on peut penser qu'«Il y a un dieu pour les cancres». Une divinité bienveillante, marchand de sable, pour aider à trouver le sommeil après les affres de la journée d'école, bonne fée pour essuyer les sermons paternels et ravaler les larmes qui laissent des traces de sel sur les joues des enfants. Ce dieu des cancres c'est la rivière. André Dhôtel, dans ce même livre, fait s'endormir son petit héros perdu dans sa route sur les bords d'une rivière — la Valserine — et dans son sommeil confus, martelé de cauchemars, le visage d'une jeune fille se posant sur lui pour le réconforter. Au réveil, il retrouve ses amis et sa route.
L'école buissonnière de Dhôtel, c'est la pêche à rôder de Jacques-Étienne Bovard, des retrouvailles avec lui-même par la grâce de la rivière.
 
 
«Oui, je te le déclare, c'est la vérité: personne ne peut entrer dans le Royaume de Dieu s'il ne naît pas d'eau et de l'Esprit. »,
Évangile de Jean 3, 5.
 
Retrouvailles et révélations, forces vives de la rivière. L'enfant perdu y trouve la force et la connaissance. Une connaissance révélée qui coule de source si elle n'est de nature divine. On l'a déjà vu dans ce blog avec Bosco et Genevoix. La rivière est pérégrination, pèlerinage souvent, et conduit à l'initiation, c'est-à-dire à la construction de soi.
Chez André Dhôtel encore, dans Le Robinson de la rivière, un jeune garçon se voit emporté par une crue « à la croisée de deux courants » sur un radeau et trouve un court repos dans le creux d'une hanse, il adresse alors une prière, à moins que ce soit une ode aux poissons: «Chers poissons, vous êtes beaux comme des fleurs et vos écailles brillent mieux que les perles de l'Orient. Apprenez que je suis un poète et que grâce à moi tout le monde se souviendra que vous étiez là aujourd'hui, plus limpides que les éclairs dans l'eau du printemps», et de retrouver ensuite, comme par miracle, la berge de pied ferme. Une illumination que Jacques-Étienne Bovard connaît lui aussi: «J'ai dix ans, j'ai pris tout seul un beau poisson et je vais en prendre d'autres, je ne suis plus ce que j'étais...» Le cancre, l'enfant, s'en trouve changé, métamorphosé, grandi. Il  construit son identité par la pratique de la rivière et de la pêche.
Le plus beau cadeau que Jacques-Étienne Bovard trouve au pied du sapin, c'est sa carte de pêche dont il admire les armoiries du canton de Vaud posées sur son nom et sa photographie et le tampon de la Préfecture, il a treize ans. Le voilà enfin pêcheur, révélé comme pêcheur.
 
«Rien n'était plus facile que de passer ainsi de l'autre côté du miroir. Il suffisait de regarder le lac, il suffisait de penser à lui ...»,
Jacques-Étienne Bovard, La Pêche à rôder.
 
Ce roman est bouleversant car il parle de l'enfance, de celle que nous avons, pour beaucoup d'entre nous, partagée, cette enfance passée au bord de l'eau pour de bonnes raisons (y en a-t-il vraiment de mauvaises quand on va à la pêche?) et qui forme une matrice dans laquelle se bercera le reste de la vie.
 
Dans ce roman, pêche et littérature sont intimement enlacées. Il est plus qu'un roman initiatique dans lequel il faut apprendre à rattraper ses rêves d'enfance, ses rêves de rivières et de poissons scintillants qui étaient là comme des amis fidèles et facétieux pour aider à traverser les temps difficiles. Peut-être avons-nous un roman d'apprentissage dans lequel l'innocence originelle de l'enfant que l'on mesure à la norme des adultes trouve dans l'aventure des eaux vives son accomplissement. Un roman autobiographique alors ? Parce que l'auteur, à travers l'écriture, fait trace de son parcours singulier et de son moi conscient. Peut-être... Mais est-ce si important?
La pêche à rôder, c'est se glisser d'une rive à l'autre, du passé au présent, de l'obscur des eaux profondes à la lumière des écailles étincelantes, de l'innocence de l'enfant pantelant devant l'inconnu à la conscience de soi de l'écrivain dans la maîtrise de son art halieutique et littéraire.
C'est raccommoder son être par le fil de la pêche, au fil de l'eau. C'est exister par les rivières et son petit peuple, confondre le biotope et le biographe. Rôder au bord de l'eau, mémoires d'outre-ondes!

ÉRIC MORELL, Chamane51

La pêche, un art de l’impatience?

Pour la plupart, pêche rime avec patience, passivité, ennui. C’est l’éternelle caricature du pêcheur en papi affalé devant sa canne, les yeux rivés à son flotteur qui ne coule jamais.
Or, à lire les récits ou à regarder les photos de Jacques-Étienne Bovard, qui rôde depuis son enfance le long des rivières et des lacs, on verra que la pêche peut se décliner en inventaire émotionnel extraordinairement contrasté et intense : le temps devient affût passionné, au seuil d’un autre monde, où se confondent la mémoire et le rêve. La rivière se livre, ou ne se livre pas, telle une femme irrésistible et insaisissable. Quel ennui? Quelle patience? Le pêcheur rôde, ruse, rêve, délire, jubile, explose – de joie, de fureur. Et c’est toujours un morceau de lui-même qu’il finit par ferrer, dans les clairs-obscurs où le regard se perd.

JACQUES-ÉTIENNE BOVARD
Texte de la quatrième de couverture de l’édition originale


La Pêche à rôder

La pêche est méprisée par les amateurs de littérature, surtout européens. Ces derniers se trompent cruellement. Qu’ils jettent un œil en Amérique et relisent Le Vieil Homme et la mer d’Ernest Hemingway et les chroniques de l’immense Jim Harrison!
Mieux encore : qu’ils se plongent dans ce recueil rafraîchissant du Lausannois Jacques-Étienne Bovard, servi par une écriture attentive, pleine d’à-propos. Dans cette version en poche, ils apprendront quelques vertus, la patience naturellement. Ils découvriront surtout un monde qui rime avec bonheur et se conjugue sur le registre d’émotions intérieurs propres à leur auteur. Simple et précieux.

THIBAUT KAESER, L'Écho illustré


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