Suzan
C.-F. Landry
C’est une œuvre d’une extrême richesse. Suzan, l’étrangère, raconte
combien il lui est difficile de s’adapter à sa nouvelle existence. Au
jour le jour, elle s’efforce de comprendre cet être imprévisible
qu’elle a épousé et le pays tout aussi étonnant, pour elle, dont il est
issu.
Toute sa vie, tantôt douce, tantôt en colère, elle essaie des gestes
d’amour qui virent aux disputes. «L’amour, quand c’est lui, discret,
bizarre, nous ne le reconnaissons pas.»
Un drame interrompt brusquement son journal, qu’elle écrivait pour savoir pourquoi elle avait gâché sa vie.
C’est une longue histoire, faite comme toute vie, de moments de bonheur
et de souffrance, d’incompréhension et de regrets, avec de superbes
descriptions tant des paysages que des caractères des habitants et
surtout de l'incommensurable difficulté qu’ont les êtres humains à se
comprendre.
JULIETTE DAVID, Suisse Magazine
L’écrivain Charles-François Landry conté par son fils
Le célèbre écrivain Charles-François Landry quittait ce monde il y a
quarante ans. Son fils, évoquera ses souvenirs d’enfance à Glérolles,
auprès d’un père à la vitalité exceptionnelle non pas lors d’une
conférence littéraire, mais par un moment convivial et chaleureux,
plein de souvenirs, le jeudi 28 novembre à vingt heures au Centre
Sous-Brosset à Granges-près-Marnand.
Landry est l’un des rares écrivains suisses romands qui a pu vivre de
sa plume uniquement. Trente poésies d’inédites, soixante-quinze romans
d’amour et d’aventure, des essais historiques, une dizaine de pièces de
théâtre ou radiophoniques. Sans compter son journal intime, inédit. Il
est primé plusieurs fois. Il pratique le journalisme pendant trente
ans, trois articles par semaine. «Diego» sera un best-seller, le clou
de sa carrière.
Sa facilité d’écriture est étonnante. Il pouvait rédiger un livre en
trois à quatre semaines, explique son fils. «J’écrirai tant que ma main
sera prise», affirmait-il. Des Chinois l’ayant contacté pour l’achat de
manuscrits s’étonnaient qu’ils soient sans ratures, Landry furieux les
renvoya: «croyez-vous que j’ai le temps de recopier mes originaux!»
leur disait-il. C’est avec une machine à écrire sur les genoux en
croquant un carré de chocolat qu’il s’éteint à l’Hôpital de Vevey où il
est transporté, le 23 février 1973.
Philippe Landry a une admiration infinie pour la force de vie de son
père. Cet amour inaltérable de la vie, qu’il considère comme un cadeau,
lui donne la puissance de surpasser l’adversité. N’a-t-il survécu à une
erreur médicale le rendant aveugle et paralysé en s’appliquant à écrire
péniblement les lettres de l’alphabet de la grandeur d’une feuille à
deux mains pour enfin retrouver son écriture fine! Sa devise, un mot,
un symbole: malgré cœur de rose qui ne flétrit.
Meurtri par la vie dès son enfance, il s’évade de chez lui à dix-sept
ans. La première partie de son existence se passe en France, à Paris et
à Uzès, où il se marie. Il aura une fille, Claire. Landry reviendra en
Suisse en 1940 pour se faire soigner d’une tuberculose aggravée. Son
éditeur et mécène Henri-Louis Mermod apprend qu’il est mourant, il le
rapatrie d’urgence en Suisse.
En 1949 naîtra d’un second mariage, Philippe dit Pompon. Un bébé choyé
par un père fasciné par les nouveaux-nés qui s’occupera de lui durant
les premiers mois.
Pompon tient de la créativité de son père, mais autrement. Touché par
le virus de l’informatique, il devient programmateur à vingt-et-un ans.
Doué pour le marketing, à trente-trois ans, il commercialisera les
produits informatiques en Europe, aux États-Unis et au Moyen-Orient.
Son père est décédé puis sa seconde femme brusquement. À quarante-cinq
ans, Philippe Landry décide alors de prendre le large. Il acquiert un
voilier, et permis de navigation en poche, accompagné de ses trois
guitares, vogue sur les océans une quinzaine d’années.
De retour de voyage depuis trois ans, installé à Granges-près-Marnand,
Philippe Landry a décidé de se consacrer à l’œuvre de son père. Fin
connaisseur des lettres romandes, l’éditeur Bernard Campiche réédite
l’œuvre de Landry dans la collection de poche camPoche, témoignant
ainsi de l’actualité de ses écrits. Des classes du gymnase étudient les
œuvres de l’écrivain. Bien d’autres projets sont prévus.
ICCG/AQR, La Broye
{…} Œuvre dense,
œuvre continue, mais généreuse et abondante, que celle de cet écrivain
qui ne veut être qu’écrivain, et ne veut vivre que de sa plume, dans
les sens que peut avoir le mot: vivre.
{…} J’ai fait la connaissance de Landry et de son œuvre – c’est du
reste le contraire qu’il faudrait dire – en 50, quand il reçut le Prix
Veillon pour La Devinaize.
J’avoue ne pas savoir où se trouve la contrée dans laquelle se passe ce
roman. Ce lac de Bret, que je ne sais où situer, existe pourtant encore
en moi dans son austérité voilée par des brumes… Je vois un petit
garçon, une femme seule devant la vie, leur complicité entre le bonheur
d’hier, la lutte pour l’existence d’aujourd’hui et, au-delà de ces
événements, quelque chose de tendre qui survit à la lecture et au
déroulement de l’histoire.
{…} Comme je comprends cet intérêt passionné d’un fils de Lausanne pour
ce héros de l’histoire de sa ville! Et j’ai ressenti comme une angoisse
sacrée quand j’ai découvert que le 22 avril 1723, alors que Davel
mourait dans les supplices à Lausanne, trois hommes et une femme de mon
pays mouraient aussi sur l’esplanade de Montpellier, pendus et
étranglés pour avoir pratiqué la religion d’Henri IV! Ces plongées dans
les malheurs du passé sont, peut-être, un des moyens les plus sûrs,
pour chacun de nous, de toucher au fond de nous-mêmes et de découvrir
en nous nos plus justes maximes de vivre.
{…} Voilà, du moins, ce que je crois entrevoir de cet écrivain perdu
dans cette Helvétie intérieure, qui n’est, au fond, qu’une part du
royaume de l’esprit, royaume si recoupé de vallées et de hautes crêtes
que nous y cohabitons bien souvent sans savoir que nous y sommes si
proches les uns des autres… Je crie donc de ma vallée vers la sienne:
«Salut, Landry!» pour qu’il sache que je suis là.
ANDRÉ CHAMSON, de l’Académie française
In: Hommage à C.-F. Landry, publié par ses amis à l’occasion de son soixantième anniversaire.
© Mme Frédérique Hébrard
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