MARCEL SCHÜPBACH

INSTANTANÉS

Récits
2020. 152 pages, avec quelques photographies. Prix: CHF 28.00
ISBN 978-2-88241-455-7


Biographie

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S comme Schüpbach

Auteur d’une poignée de longs-métrages remarqués et pilier de l’émission Temps présent, le réalisateur vaudois Marcel Schüpbach livre ses souvenirs sous forme de brefs Instantanés, tour à tour captivants, frustrants et éclairants, parus chez Bernard Campiche Éditeur.

Nos cinéastes n’ont pas trop l’habitude de se raconter. Une interview au sujet d’un nouveau film, passe encore, mais un livre pour étaler sa vie? Certes, on peut se souvenir des appréciables Ciné-mélanges en forme d’abécédaire d’Alain Tanner (2007), plus leçon de cinéma que mémoires, et surtout du frappant Swiss Paradise de Rolf Lyssy (2010), chronique d’une dépression plutôt que de toute une existence vouée au septième art. Mais au-delà? Sur ce terrain à peu près vierge, voici à présent le Vaudois Marcel Schüpbach, né en 1950 à Zurich, cinéaste retraité. Après s’être essayé au roman (Deuxième vie, Campiche, 2018), le voici qui livre des Instantanés de son demi-siècle de carrière.
Schüpbach? Ceux qui n’auraient pas vu ses trop rares longs-métrages de cinéma (L’Allégement, Happy End, Les Agneaux, B comme Béjart, La Liste de Carla) sont sûrement tombés un jour ou l’autre sur un de ses nombreux reportages pour la TSR/RTS, sans avoir forcément retenu son nom. C’est là le paradoxe central de ces mémoires: elles sont le fait d’un quasi-inconnu, dont l’exigence et le talent n’ont d’égales que la modestie et la discrétion. Quant au parcours qui s’y esquisse, il est à la fois unique et très (trop) typique.
Dans ce petit ouvrage composé d’une trentaine de chapitres d’environ quatre pages, chacun consacré à un tournage, on peut très bien picorer au hasard. Mieux vaut pourtant prendre par le début. Comme souvent dans le genre autobiographique, le meilleur se trouve là, dans la reconstruction d’une vocation. Dans le cas de Schüpbach, une souffrance liée à un accès difficile au langage l’a amené à s’exprimer en images. Un de ses premiers courts-métrages, Murmures, où il observe le quotidien de son grand-père chaux-de-fonnier, est déjà remarqué à Soleure; un autre consacré au peintre Lermite juste après son décès lui révèle la grandeur et la solitude de l’art véritable. Les phrases sont simples, les mots justes.

Du désir de maîtrise à l’écoute

Forcément, on l’attend sur ses principaux titres de gloire. Du prometteur L’Allégement, on apprend l’inspiration bressonnienne et le triste destin de son interprète Anne Caudry. De l’ironiquement titré Happy End, les conflits avec un chef opérateur rigide et un désir de provoquer peu payant. Du sous-estimé Les Agneaux, les exigences traumatisantes d’une coproduction avec la France. On voudrait plus, mais l’auteur s’en tient à son principe de courtes évocations. Exit donc le «grand» cinéma de fiction, cet art apparemment si difficile pour un cinéaste d’ici. Il est évoqué une dernière fois à l’occasion d’une rencontre en… Mongolie avec son aîné Kurt Gloor (trois fictions lui aussi), dont l’acharnement à poursuivre son rêve envers et contre les instances fédérales connut une issue tragique.
Plus pragmatique, Schüpbach, trouve alors refuge à la télévision, cet aspirateur à talents dont rares sont ceux qui en réémergent intacts. Surprise, l’homme y a trouvé son compte, en se tournant résolument vers le genre documentaire. Ses qualités de regard et d’écoute l’ont amené jusqu’à devenir un pilier de l’émission la plus prestigieuse de la TSR, Temps présent. Entre portraits d’artistes (Luc Bondy, Pierre Amoyal, Jacques Chessex), reportages lointains (Madagascar, Caucase, Serbie), enquêtes consacrées à des femmes en difficulté (meurtrière, jeunesses fracassées, immigrées algériennes) ou à des exploits humains (percement d’un tunnel), chaque tournage a été source de rencontres, d’apprentissages et d’impressions fortes. Par contre, le fil biographique s’y perd et les instantanés se transforment de plus en plus en dialogues, dans une écriture plus routinière.

Filmer contre la mort

Émergent comme par hasard ses projets de plus longue haleine pour le cinéma: le magnifique B comme Béjart, qui aura exigé une formidable ténacité face à un sujet d’une rare ingratitude, et le passionnant La Liste de Carla, qui ne laisse pas soupçonner les trésors de diplomatie qu’il aura fallu pour suivre Carla Del Ponte à l’œuvre au Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie. Dernier projet pour le cinéma, un portrait du
musicien de jazz américano-suisse George Robert doit être abandonné suite au décès de ce dernier. On comprend dès lors mieux l’attrait du relatif confort télévisuel. Cette mort qui rôde, qui prive Schüpbach trop tôt de sa première compagne et qui semble a posteriori le fil rouge de toute l’œuvre – comment la conjurer, comment la dépasser, comment l’accepter –, recevra néanmoins sa plus belle réponse sur petit écran: un Temps présent intitulé Une affaire de cœur (2006), dans lequel le cinéaste saisit dans un exercice de haute voltige l’exploit médical d’une transplantation cardiaque, suivi d’un Deuxième souffle (2077) consacré à Loréna, la jeune fille qu’elle a permis de sauver.
On peut comprendre que l’effort s’arrête là. L’homme semble y avoir puisé une certaine sérénité pour faire face à la dernière étape de l’existence, au contraire de tant d’artistes qui refusent de lâcher quoi que ce soit. Tant pis pour nous, privés de celui qui aurait sans doute pu devenir un de nos plus grands réalisateurs. À sa manière trop modeste et sous ses apparences décevantes, ce petit recueil qui utilise les images comme déclencheurs de souvenirs et marqueurs d’une vie dit finalement très bien toute la difficulté qu’il y a à être un cinéaste suisse. Comme l’énonce joliment le préambule: cinquante ans d’expériences «qui ont fait du cinéaste que je voulais devenir la personne que je suis aujourd’hui.»


NORBERT CREUTZ
, Bon pour la tête, 18 février 2021

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Instantanés

Qu’il est passionnant de découvrir la genèse d’une vocation et ensuite son déploiement, comme y invite les récents Instantanés de Marcel Schüpbach

Le cinéaste suisse, né en 1950 à Zurich, s’est notamment fait remarquer par son film L’Allégement (1983) tiré du roman de Jean-Pierre Monnier et sélectionné au Festival de Locarno où il obtint le Grand Prix du Jury des Jeunes, mais également par ses documentaires. Ainsi Violon Passion, relatant la relation de Pierre Amoyal à son Stradivarius, remporta un FIPA d’or au Festival international des programmes audiovisuels et B comme Béjart (2001) ou La Liste de Carla (2005), consacré à l’indomptable et persévérante Carla Del Ponte, procureur du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, rejoignirent un large public. Aujourd’hui, ses fragments littéraires permettent de rencontrer l’homme derrière la caméra, pour qui tout a commencé au Belvédère. À cette époque, après avoir insisté, le gymnasien de 17 ans obtient du directeur l’autorisation de participer à la Semaine d’études cinématographiques de Leysin pour y présenter son premier court métrage. Les dés sont jetés, sans que le jeune Marcel ne soit pleinement conscient qu’il engage là tout son avenir. Aussi revient-il, dans plus de vingt récits bien enlevés, sur ses rencontres fortes, sans masquer ni ses échecs ni ses réussites, tout en croisant au passage quelques monstres (Béjart, Chessex, Del Ponte). Toutefois, ce sont plutôt les femmes et les hommes moins connus qui retiennent l’attention  et attestent de la manière délicate d’entrer en relation. Quelques mots, une ou deux anecdotes, une image imprimée dans la rétine («un pyjama Calida vert bouteille») jouent le rôle de révélateur photographique et «l’instantané» d’apparaître. Par exemple, on rejoint ainsi le metteur en scène Luc Bondy dans l’appartement de Berlin où il vient d’emménager; Ruth, pensionnaire de la prison de La Tuilière à Lonay qui rayonne en parlant de son petit Marco; Georges Robert, saxophoniste alto de jazz et directeur de l’EJMA, que la mort emportera avant le tournage qu’ils avaient prévu ensemble. Au détour des pages, le cinéaste évoque ses nombreux apports à l’émission Temps présent de la Télévision suisse romande, et ses échos, tel le courrier reçu un jour de Lorena, petite greffée du cœur devenue grande et voulant devenir monteuse. «Chaque tournage, chaque montage, est une expérience collective», écrit Marcel Schüpbach, dont les réalisations sont empreintes d’une humanité qui leur confère une immense valeur.

SERGE MOLLA, Ciné-Feuilles, No 841, 23.09.20

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Instantanés de Marcel Schüpbach chez Bernard Campiche Éditeur

—  Je te préviens: j’ai reçu ce livre des Éditions Campiche en service de presse.
—  Est-ce que ça veut dire que tu n’aurais pas eu l’idée de l’acheter?
— Ben, jusqu’ici personne n’en a parlé et les librairies étaient fermées.
—  Tu n’es pas abonné aux publications de Bernard Campiche?
— Heu, non, je ne suis pas très porté sur la littérature romande.
— Et le livre dont tu veux parler échappe à ce que tu appelles littérature romande? Quel est le dernier bouquin édité par Campiche que tu as lu?
—  Heu, Deuxième vie, un roman du même auteur.
—  Que tu as aussi reçu en service de presse?
—  Heu, oui.
—  Et tu n’as reçu que ces deux livres en service presse?
—  Heu, oui.
—  On peut savoir comment Bernard Campiche sait que c’est l’auteur qui te convient et dont tu auras envie de parler?
—  Je n’ai pas parlé du premier. Mais j’aurais pu le faire. Il raconte l’histoire d’une directrice des ressources humaines à la RTS, qui, après une greffe du cœur, devient humaine en recherchant l’origine de son nouveau cœur.
—  Et ce n’est pas de la littérature romande?
—  Heu…
—  Tu n’as pas répondu à ma question. Pourquoi Bernard Campiche t’envoie les livres de cet auteur en particulier.
—  C’est mon frère.
—  Ha. Et tu allais expliquer en quoi son dernier livre était différent des autres, que tu n’avais pas lus.
—  J’aurais montré comment il avait choisi d’illustrer par des épisodes savoureux son parcours de cinéaste de fiction puis de reportages au lieu d’expliquer laborieusement sa conception du cinéma.
—  Tu n’en feras rien. Au lieu de parler du livre, tu vas le laisser parler. Tu as 2517 signes espaces compriss, pas un de plus, pas un de moins. Et je ne veux pas un seul commentairede ta part. C’est compris?

1. Retrouvez ci-contre la fin des cinq récits qui commencent ainsi:
   
Un ami me prête sa Bolex à ressort.
    J’ai dix-sept ans, je suis dans le bureau du directeur du Collège du Belvédère et je viens de dire non.
    Intérieur jour, chambre d’hôtel. Ce jour-là, nous tournons une séquence de mon deuxième long-métrage de fiction, un «road-movie» déjanté et fauché qui laisse beaucoup de place à l’improvisation.
    Me voilà nommé producteur éditorial du magazine Temps présent.
    Printemps 1987. Le violoniste Pierre Amoyal donne un cours de perfectionnement à l’école de musique de Saluzzo, en Italie.

Réponses possibles:
    a)    Heureusement pour moi, il y a des possibilités de travail à la télévision.
    b)    Je rends grâce au cinéma qui m’a donné le moyen de m’exprimer.
    c)    On n’imagine jamais les batailles à mener pour réaliser ses rêves…
    d)    Je comprendrai plus tard le sens profond de la leçon. Lorsque j’aurai acquis suffisamment de métier pour oublier définitivement la technique.
    e)    C’est décidé, je vais faire du cinéma.


2. Trouvez ci-contre les personnages filmés dont il est question dans trois récits:
    Nous pourrons filmer tout ce que nous avons demandé, mais rien ne pourra être dévoiler avant que …………… n’ait visionné le montage final et donné son aval.
    Premières images pour se mettre en train. Un paquet de croquettes à la main, …………… sort sur la terrasse et appelle son chat.
    «Je ne me reconnais pas de ce film et sa diffusion n’est pas conforme à mon désir artistique.»

Réponses possibles:
    a)    Jacques Chessex
    b)    Maurice Béjart
    c)    Carla Del Ponte


3. Qui parle, dans six récits à propos de films reportages?
    —  Puis je poursuis ici, avec les barrières qui se sont trouvées sur mon chemin, avec du sang aussi dessus.
    —  En fait, on a beaucoup de temps à attendre, on est beaucoup de temps tout seul.
    —  Cet enfant, un jour, il va me demander: «Maman pourquoi?»
    —  Voilà, je lui mets une couche, normalement je le change toutes les trois heures, comme les vrais bébés.
    —  La maladie m’a appris que la vie quotidienne a une valeur spéciale, particulière.
    —  Mon chien représente beaucoup de choses pour moi. En fait, euh, tout.

Réponses possibles:

    a)    Un prisonnière
    b)    Un saxophoniste
    c)    Une jeune fille dans un foyer
    d)    Une prostituée
    e)    Un homme sous tutelle
    f)    Une malade mentale


4. Qui parle, à propos du film de fiction Les Agneaux?
    — Oui, mais dans votre film, on y croit. Dans les autres, c’est du cinéma.

Réponses possibles:
    a)    Un censeur
    b)    Un imbécile
    c)    Un pervers
    d)    Un pasteur

Solutions du compte-rendu à choix multiples
1. e/b/a/c/
2. c/a/b
3. c/d/a/f/b/e
4. a ET d, ET b OU c

(SCH.)
, La Distinction, juin 2020

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Instantanés de Marcel Schüpbach chez Bernard Campiche Éditeur

Installez-vous dans votre fauteuil préféré et plongez-vous dans l’univers du réalisateur Marcel Schüpbach. Il a recueilli quelques-uns des instantanés qui ont jalonné sa carrière. Des témoignages de la vie ordinaire. Des gens à qui il aime donner la parole et qui acceptent de livrer un pan de leur vie, de mettre à nu leurs émotions sous l’œil de la caméra, jamais intrusive, mais discrète et efficace.
Il filme, sans concession, deux retraités dont la vie s’enroule autour d’eux, indifférents aux tempêtes qui secouent le monde. Il y a la petite Loréna à qui on vient de greffer un cœur. De Marseille à Lyon, sa caméra balaie cette course-poursuite contre la montre. Intensément. Il retrouvera la jeune femme quinze ans plus tard.
Nado éructe: «À bas Milosevic et sa clique!». Il travaille dans le plus grand complexe industriel de l’ex-Yougoslavie. À la tête d’une poignée de manifestants, il réclame un salaire décent. Le cinéaste est là. Dans la prison de Lonay, le réalisateur est face à Ruth, considérée comme une dangereuse criminelle et dont le petit Marco, cinq ans, ne réussira pas à la tirer du piège de l’héroïne.
Il y a aussi dans son champ de vision des personnages charismatiques, sous les feux des projecteurs. Béjart, être solaire, mais que Schüpbach doit apprivoiser. Pierre Amoyal qui s’est fait voler son fameux «Kochanski» de 1717 et qu’il retrouvera cinq ans plus tard à Turin.
Filmer Madame le Procureur du TPY n’a pas été une sinécure. Il s’est déjà frotté à Chessex mais avec Carla del Ponte, il s’est livré à un acte de bravoure afin de «coller à ses basques jusqu’à l’extrême limite du possible».
En préambule, le réalisateur raconte ses débuts au cinéma. Il faut avoir la foi du charbonnier pour ne pas être découragé par les embûches. Mais sa foi à lui soulève des montagnes. En cinquante ans, Marcel Schüpbach a réalisé plusieurs longs métrages de fiction et une quarantaine de grands reportages en Suisse et à travers le monde pour la télévision.
Conteur né, que ce soit avec sa caméra ou la plume, le cinéaste a publié Deuxième vie en 2018 chez Bernard Campiche.


ÉLIANE JUNOD
, L'Omnibus, 19 juin 2020

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Un cinéaste à travers des bribes de souvenirs

Le titre est parfaitement choisi: Marcel Schüpbach livre des souvenirs et des anecdotes sous forme d’Instantanés. Avec la brièveté et l’aspect éclaté que sous-entend le terme. Ici, pas question de longues analyses, ni de réflexions approfondies, mais de son parcours de réalisateur, évoqué en courts chapitres qui sont autant de moments forts. Le livre invite à une balade dans cinquante ans de cinéma et de télévision à travers des figures, des voyages, des tournages difficiles ou heureux, des instants de grâce ou de peine. Le réalisateur de L’Allègement et de B comme Béjart se dévoile avec simplicité et honnêteté. Il ne cherche pas à se plaindre ni à se hausser du col, ne tombe pas non plus dans le piège de l’écriture littéraire à tout prix. Le regard que pose Marcel Schüpbach dans les coulisses demeure empli d’humanité et de modestie. Il permet à la fois d’éclairer sa riche trajectoire et de retrouver des personnalités marquantes comme Jacques Chessex, Maurice Béjart (qui lui a appris qu’«il faut savoir écouter son ventre et ne rien lâcher») ou Carla Del Ponte. Mais c’est aussi par ces anonymes que l’ouvrage se révèle touchant, qu’ils soient rencontrés à Tbilissi, au Tadjikistan, à Belgrade ou dans un centre d’accueil pour «jeunes à la dérive» des environs de Bienne.


ÉRIC BULLIARD
, La Gruyère, 12 juin 2020

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Arrêts sur image


Dans Instantanés, le réalisateur Marcel Schüpbach retrace sa trajectoire en vingt-neuf brefs récits où le professionnel et lintime sont en constant dialogue

«Cette suite d'instantanés retrace cinquante ans de cinéma, évoque les rencontres, aventures, échecs, succès, qui ont fait du cinéaste que je voulais devenir la personne que je suis aujourd'hui», écrit joliment Marcel Schüpbach en préambule à Instantanés, vingt-neuf brefs récits qui retracent une trajectoire où le professionnel et l'intime sont en constant dialogue. C'est ce qui fait la saveur de ces arrêts sur image, que le réalisateur raconte les aléas d'un tournage, l'inattendu d'une rencontre ou les histoires incroyables que recèle le réel: derrière chaque film, il y a d'abord des gens, une équipe, des trajectoires révélées par son regard neuf et curieux que chaque tournage transforme.
Réalisateur de fictions (Happy End, L'Allégement, adapté d'un roman de Jean-Pierre Monnier ou Les Agneaux, d'après Ania Carmel) et de documentaires pour le cinéma et la télévision, Marcel Schüpbach a réalisé une quarantaine de reportages pour la télévision et a été producteur de Temps Présent, avant de signer un premier roman, Deuxième vie (Campiche, 2018). Ici, en peu de mots, dans une prose sobre au service de son propos, il raconte sans fard ses débuts à l'âge de quinze ans et les coulisses de ses tournages, d’Oulan-Bator à Tananarive, de La Haye à Douchambé, de Paris à La Chaux-de-Fonds. On y croise Chessex, Béjart ou Carla Del Ponte (ses deux longs métrages documentaires, B comme Béjart et La Liste de Carla, ont connu une diffusion mondiale), le metteur en scène Luc Bondy ou le violoniste Pierre Amoyal. Mais aussi des inconnus qui l'ont touché: une fillette opérée du cœur, des prostituées, des malades mentaux. On aime l'humanité du propos, l'humilité du regard, la sobriété de l'écriture, tandis que ce regard rétrospectif ravive aussi l'histoire et la culture d'un lieu et d'une époque.


ANNE PITTELOUP
, Le Courrier, 4 juin 2020

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Adolescent, Marcel Schüpbach a peine à communiquer. Il lui faut absolument trouver un autre langage: «ce sera le cinéma.» C'est ainsi que, têtu, à l'âge de dix-sept ans, il réalise un court-métrage et obtient qu'il soit présenté par son collège à la Semaine d'études cinématographiques de Leysin.
C'est le premier des vingt-neuf récits d'Instantanés. Les autres n'auraient pas eu lieu sans celui salvateur qui l'identifie au cinéma. Ils sont pris tout au long de cinquante années, au cours desquelles il abordera aussi bien la fiction que le documentaire et devra faire montre de ténacité et de caractère.
Tout ne va pas lui réussir. Mais n'apprend-on pas davantage de ses échecs que de ses succès? En tout cas, avec le cinéma, il a trouvé sa voie et est devenu l'homme qu'il est aujourd'hui, un réalisateur qui a appris «à regarder le monde» et «à capter la vraie vie» et, pour ça, su faire ce qu'il fallait.
De ces récits, il ressort qu'il a l'esprit ouvert, qu'il sait prendre des risques, qu'il ne se laisse pas contaminer par l'air du temps et, surtout, qu'il aime les gens, qu'ils soient de parfaits inconnus ou célèbres comme Luc Bondy, Pierre Amoyal, Jacques Chessex, Maurice Béjart ou Carla del Ponte.
Les inconnus sont par exemple des malades mentaux, une criminelle qui a enfanté en prison, des jeunes à la dérive, un jeune blessé tadjik, une prostituée, un mineur creusant le tunnel du Lötschberg ou encore des Algériennes révoltées contre le code de la famille qui, partout, s'applique à elles.
Subjectivement un instantané me parle plus que d'autres: celui de l'entretien que l'auteur a avec cet animateur de théâtre qu'était Luc Bondy et qui parle de l'amour, l'amour qui est au fond le grand sujet, celui qui a plus d'importance que tous les autres parce que tout dans l'existence tourne autour de lui: «Shakespeare a beaucoup écrit là-dessus et montré que tout est tellement lié.»
Un autre «instantané» me tient à coeur, c'est le cas de le dire, c'est le tournage, en 2005, en quelque trente-deux heures, d'une transplantation cardiaque opérée sur une petite Loréna de cinq ans et demi, «l’extraordinaire voyage d'un coeur de la mort à la vie,» qui trouve son épilogue douze ans plus tard.
Avec Loréna, dix sept ans, Marcel Schüpbach réalise en effet son dernier film, diffusé en octobre 2017 sous le titre Deuxième souffle dans le magazine Temps présent de la Radio Télévision Suisse. Pendant le tournage, elle n'arrête pas de lui poser des questions sur le montage. Il lui trouve un stage: «Loréna deviendra peut-être un jour monteuse.»


Blog
de FRANCIS RICHARD

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(…) cette semaine, lisons le cinéaste Marcel Schüpbach. Son livre Instantanés vient de paraître chez Bernard Campiche, il raconte trente-huit courtes histoires vraies, drôles, émouvantes, interpellantes, stimulantes. Comment voyons-nous, comment captons-nous le monde? (…)

JACQUES POGET
, sur Musique Matin, RTS Espace 2, samedi 25 avril 2020

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En vingt-neuf instantanés, l’auteur retrace cinquante ans de cinéma et raconte les moments clés de son parcours de réalisateur. On rencontre en coulisses quelques monstres sacrés tels Béjart, Chessex ou Carla Del Ponte, mais aussi de parfaits inconnus qui ont marqué de leur empreinte les films du cinéaste. Pour Schüpbach, l’expérience du réel a souvent dépassé la fiction, semant son chemin de petits cailloux blancs.


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