Le passé interrogé
Entré en littérature l’an dernier avec La Mort digne,
où il faisait montre d’autant de maturité que de maîtrise dans le
traitement d’un thème délicat, Frédéric Lamoth poursuit avec une belle
progression avec ce roman plus intimement engagé, puisque le jeune
auteur, de père hongrois, interroge ses racines par le truchement d’un
lien noué entre un étudiant et un handicapé, la soixantaine finissante,
qui l’engage au titre de secrétaire particulier. Dans une atmosphère
évoquant le temps suspendu d’une autre Europe, le jeune narrateur est
conduit dans une région de l’Histoire où plongent ses propres racines.
JEAN-LOUIS KUFFER, 24 Heures
Frédéric Lamoth éclaire une page d’histoire qui le concerne
Le jeune auteur va la rencontre d’une génération de réfugiés venus en Suisse en 1956
Un roman des origines qui séduit par son atmosphère, dans une forme un peu engoncée.
Frédéric Lamoth, jeune médecin né à Vevey de père hongrois et de mère
suisse, aborde la trentaine avec deux fictions en poche. Il est entré
sur la scène littéraire romande l’année dernière avec La Mort digne,
où, condamné par la médecine, un officier instructeur à la retraite
planifie sa mort comme il avait organisé sa vie: avec discipline et
efficacité. Le parcours du mourant était retracé par son fils. L’auteur
aborde le thème de la filiation de façon plus intime dans son deuxième
roman paru en octobre, puisqu’il y questionne, par héros interposés,
ses propres origines. À l’instar de son premier livre, un jeune adulte
relate les derniers mois d’un sexagénaire dans Les Sirènes de Budapest,
où le narrateur n’est pas le fils, ni le beau-fils (il s’en est fallu
de peu), mais le «secrétaire particulier» du bientôt mort, dont il va
cependant devenir l’héritier d’un secret lourd de douleurs. Georges
Toth, handicapé suite à une attaque cérébrale a engagé François Kàrolyi
afin qu’il s’occupe de sa correspondance et lui fasse la lecture.
Activités immédiatement ou vite délaissées pour de longues
conversations, et non pour un monologue sinueux, comme pourrait le
faire penser le texte, qui tire une grande force de cette ambiguïté.
Car derrière le récit de vie de Georges, dont la narration chercher à
éclairer les zones tenues dans l’ombre, une autre histoire s’esquisse,
celle de François qui, en explorant les racines du vieil homme, ressent
le besoin de démêler les siennes. Racines ancrées dans un terreau
commun, la Hongrie, où Georges et les parents de François ont vécu
avant de partir en exil.
Après s’être évertué à le fuir sa vie durant, Georges exhume son passé
avec obstination. François récolte, puis assemble les souvenirs de ce
Juif errant, dont il écrit le mythe plus que la biographie, laissant
tourner les confidences dans son esprit qui y mêle son grain de
fiction. Ce voyage au pays de la mémoire (individuelle et collective)
est intelligemment organisé par Frédéric Lamoth, qui remonte le temps
pour aller à la rencontre d’une génération de réfugiés hongrois venus
en Suisse en 1956. Si cet écrivain débutant passe aisément l’épreuve du
second roman, sa plume (encore) frileuse manque d’élan. En résulte un
récit appliqué, qui a une belle tenue, mais peu de personnalité, qui
contient trop de poncifs, d’images déjà taillées et retaillées par
d’autres auteurs. Les Sirènes de Budapest
vaut néanmoins le détour tant pour son propos historique, ses
méditations sur «le terrain vague du passé» que pour ses intrigues,
finalement tellement banales, comme la vie, où les hommes meurent avec
leur mystère.
ÉLISABETH VUST, 24 Heures
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Un
étudiant en médecine en déroute répond à une petite annonce demandant
«un secrétaire particulier parlant hongrois». C’est la langue de son
enfance, il a besoin d’argent et de dérivatif: il va donc lire pour un
grand malade, reclus dans une villa de la côte lémanique, le Kaddish pour l’enfant qui ne naîtra pas
d’Imre Kertesz. Et surtout, ce jeune homme va entrer dans un univers
gris, sous lequel s’agitent encore faiblement des secrets de famille,
avec leur lot ordinaire de culpabilité et de souffrance. Lui-même est
d’une famille hongroise chassée par les événements de 1956. Aux
souvenirs de son étrange employeur, il va donc confronter ceux qu’il a
hérités des siens et découvrir «le poids de l’Histoire dans nos vies».
Désemparé, sans but réel dans la vie sinon d’écrire, il semble se
laisser gagner par la mélancolie qui se dégage de ses rencontres
quotidiennes. Une silhouette féminine s’y dessine parfois: la fille du
malade. On se dit qu’une histoire d’amour pourrait naître entre ces
deux solitaires, mais non, c’est comme s’il ne restait plus assez de
force vitale pour enflammer un sentiment. Frédéric Lamoth, comme son
narrateur, est d’origine hongroise par son père. Devenu médecin, il a
déjà publié La Mort digne en 2003.
ISABELLE RÜF, Le Temps
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Le passé à découvert
Un étudiant en médecine répond à une petite annonce, un vieil homme
cherche un secrétaire particulier parlant hongrois. Le jeune François
lui fait la lecture et, surtout, l’écoute raconter ses souvenirs de
réfugié qui a fui la Hongrie de 1956. Le narrateur y découvre les
secrets de ce passé et prend conscience de l’histoire de ses propres
parents.
Dans Les Sirènes de Budapest, le Vaudois Frédéric Lamoth (auteur en 2003 de La Mort digne,
son premier roman) tisse avec subtilité les liens entre ces deux
personnages. La construction se révèle habile, le thème de la mémoire
et de sa transmission est exploré avec justesse. Le livre reste
toutefois fort classique et d’un style parfois à la limite du convenu.
ÉRIC BULLIARD, La Gruyère
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