…Les
événements rapportés se sont pour la plupart passés entre 1794 et 1801.
Deux séries d’évocations retiendront tout particulièrement l’intérêt du
lecteur. Au moyen d’une succession de phrases brèves et de
chapitres courts, Suzanne Deriez, un peu à la manière d’un peintre
impressionniste qui juxtapose sur sa toile du multiples petites touches
de couleurs, dresse le portrait de la fille aînée de David-Emmanuel
Develey et d’Élisabeth Antoinette née von Gonzenbach, Suzette Develey.
Cette figure est touchante. Pure, consciencieuse, aimante, sensible aux
spectacles de la nature, ouverte aux interrogations religieuses, cette
adolescente s’est longuement dévouée pour les siens entre un père
maladif qui va bientôt mourir et une mère que de douloureux malentendus
ont contrainte à demeurer trop longtemps absente.
Ce livre raconte parallèlement les épreuves que la Suisse, devenue l’un
des champs de bataille de l’Europe, eut à endurer à cette époque.
Suzanne Deriez a très justement réussi à affranchir ses pages d’une
vision des circonstances d’alors que certains Vaudois ont parfois
tendance à trop idéaliser. L’unanimité politique entre nous était loin
d’être réalisée. Frédéric-César de la Harpe, Pierre Ochs, aujourd’hui
fréquemment portés aux nues, étaient détestés par la plupart des gens.
Il n’est pas jusqu’à notre cher Henri Pestalozzi, momentanément grisé
par l’idéal révolutionnaire, qui ne s’est quelquefois comporté en
affreux petit Saint-Just sanguinaire.
SAMUEL DUBUIS, Le Régional
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