Retraçant
la vie et les réflexions de l’auteur de 1993 à 1999, ces carnets
contiennent de lumineuses pages sur le peintre Thierry Vernet, le
plaisir, la paternité, l’ivresse et la solitude, le deuil ou encore la
peinture. Et à l’introspection poético-molle si courante sous nos
latitudes, Jean-Louis Kuffer oppose un franc-parler sobre, sans pathos,
réfléchissant aux conditions d’écriture. On suivra notamment avec
attention son propos sur le roman capable de «parler» de la réalité
contemporaine, au moment où il engage la rédaction de Viol de l’ange.
Dès 95, Jean-Louis Kuffer estime que de l’état de sybarite jouisseur il
passe à une quête plus sérieuse des mots. Depuis, il travaille avant
l’aube, tous les jours, à la recherche patiente d’une œuvre encore en
gestation. Notant au passage aussi bien la nécessité de l’ivresse, donc
de l’excès, que de l’amitié et de la solitude ponctuelle dans ce lieu
montagnard où l’écrivain aime à se retirer, et qui porte le si beau nom
de «La Désirade». De plus, ce livre est un carnet de bord
revigorant. Surtout lorsqu’il sait dire comment un livre, un texte,
peut rendre la vie plus vivable. Antonio Lobo Antunes, Paul Nizon,
Maurice Chappaz ou même Balzac, ils sont là, tels que lus ou rencontrés
par Kuffer. Certaines pages sont une belle invitation à la lecture …C’est
une œuvre en chantier qui nous est proposée ici. On peut y préférer la
longue réflexion sur la création littéraire qui fait de l’Ambassade du papillon un livre assez unique dans le paysage éditorial romand contemporain.
JACQUES STERCHI, La Liberté
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