Un
scénario à se casser la figure, mais Armen Godel réussit à imposer un
style remarquable, ainsi qu’une vision du monde parfaitement cohérente
dans l’absurde et le désespoir. L’histoire, à proprement parler, traîne
en longueur comme la vie qui ne change pas pour celui qui a renoncé à
comprendre (comprendre quoi?), et ne vit que d’attente désabusée.
Ballotté, dérivant d’un rôle à l’autre, d’une province lugubre à
l’autre, Louis n’a pour surnager que sa passion et l’espoir qu’elle
nourrit encore, paradoxalement: «Dès le départ déjà, le cœur n’y était
qu’à moitié, sans cesse tourné en défiance, par impossibilité ou par
peur de s’aimer.» Lavinia, même présente, même dans l’étreinte,
crûment, froidement décrite, paraît lointaine, ailleurs déjà, comme
vouée à un éternel départ. Quant aux amis, aux collègues, ils errent
eux aussi dans le monde secret, n’offrant guère de secours aux autres.
Livre noir, à l’atmosphère de cauchemar rampant, dont l’empreinte
désespérée reste longtemps à l’esprit du lecteur, malgré la fin en
échappée heureuse, qui conserve d’ailleurs un aspect passablement
funèbre: «Les couleurs elles-mêmes se délavent, le bleu et le gris se
dissolvent, et pâlissent. Tout est avalé, absorbé. Ne reste qu’un grand
vide dépourvu de cadre.»
JACQUES-ÉTIENNE BOVARD, Le Nouveau Quotidien
Isola Bella dramatise la passion et l’énigme de l’existence. Armen Godel nous offre un superbe roman initiatique…
JEAN-DOMINIQUE HUMBERT, La Liberté
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