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«Pourquoi écrivez-vous, M. Milcé?»
Il
écrit depuis vingt ans et son premier roman paraît cette semaine.
Jean-Euphèle Milcé, né en Haïti, est le lauréat du Prix Georges-Nicole.
Rencontre.
Milcé. Jean-Euphèle Milcé. Le nom loin
remonte. Un nom qui résonne dans celui de ces Noirs américains qui ont
décidé de quitter les Etats-Unis. «Fascinés par Haïti. Passionnés par
Haïti, avec son autonomie, sa liberté toute arrogante.»
Haïti où Jean-Euphèle Milcé a grandi, où il a fait ses études
(linguistique appliquée, gestion de documentation et de bibliothèques),
où il a enseigné la littérature créole et dirigé la principale
bibliothèque patrimoniale, Haïti où il s’est mis voici plus de vingt
ans, à écrire. «De la poésie essentiellement. En créole.» Et quand
Jean-Euphèle Milcé débarque en Suisse il y a quatre ans – il a épousé
en Haïti une Fribourgeoise et ils sont parents de jumeaux, Juliane et
Sébastien, aujourd’hui 4 ans et demi –, voilà qu’il se met à un roman. «L’Alphabet des nuits,
je l’ai commencé le jour où je suis arrivé en Suisse.» Et c’est ce
manuscrit qui paraît cette semaine et reçoit le Prix Georges Nicole.
«Chaque matin, je me réveille avec l’histoire de faire un texte… Je vis
en permanence avec cela. J’écris chaque jour.» Pourquoi écrire? «En
Haïti, c’était ma manière toute simple de questionner l’ordinaire, et
s’il le faut, par ricochet, dénoncer aussi avec une espèce d’ironie.»
«Ecrire? Je crois que c’est ma manière de questionner ma société, et puis mon monde, aussi.» Ecrire, c’est aussi dans L’Alphabet des nuits,
«présenter Haïti sous un aspect qui est très mal connu. C’est un pays
de migrants, un pays qui a du mal à trouver ses propriétaires, en Haïti
la terre n’appartient à personne, c’est un pays qui a été colonisé,
mais par tout le monde, les Espagnols, les Anglais, les Noirs
africains, les Noirs américains, les Arabes, les Syriens, les Juifs,
les Américains: oui, c’est un pays de transit. En transit. Tout le
monde passe sur cette terre et personne ne se questionne quant à son
avenir.» Après avoir travaillé, à Genève et à Lausanne dans des
bibliothèques, Jean-Euphèle Milcé va ouvrir une galerie, à Fribourg,
consacrée à l’art plastique caribéen. La galerie Yanvalou. «Le mot dit
une danse d’apparat, extrêmement lancinante, dans la culture vaudou.»
Le livre que Jean-Euphèle Milcé aurait aimé avoir écrit? Les Croix de bois, de Dorgelès. Parmi les auteurs qui l’accompagnent? «Artaud et Cocteau».
Dans dix ans? «Je m’imagine en train de finir un cinquième livre et de
partager mon temps sur des projets culturels entre Haïti et Suisse.»
Premier roman
Haïti traversé à vif
Voilà donc que débarque ce livre, ce roman qui taille dans les jours
d’Haïti et qui court la vie de Port-au-Prince, voilà donc qu’il déboule
ce premier roman, L’Alphabet des nuits, ses pages qui palpitent de vie, de peurs, d’éclats et qui remontent dans la chair éclatée de la mémoire. Cet Alphabet des nuits
est le douzième texte auquel est attribué le Prix Georges Nicole. Un
prix destiné à un auteur écrivant en langue française (suisse ou
domicilié en Suisse) n’ayant jamais été édité. Le Prix Georges Nicole
(doté de 3000 fr.) a découvert les premiers textes de Jean-Marc Lovay,
Anne-Lise Grobéty, François Conod, Elisabeth Horem, Yves Rosset,
Sylvaine Marguier ou notamment Catherine Safonoff. Parmi les
soixante manuscrits qui lui avaient été adressés, le jury du Prix
Georges Nicole, composé de Bertil Galland, Christophe Gallaz, Sylviane
Dupuis, François Debluë, Eugène, Daniel de Roulet, Jean-Dominique
Humbert, Alexandre Voisard et de la rédaction de la revue littéraire
Ecriture (Françoise Fornerod, Daniel Maggetti, Sylviane Roche), a élu à
l’unanimité L’Alphabet des nuits, de Jean-Euphèle Milcé. Des extraits de manuscrits retenus paraîtront dans Ecriture.
JEAN-DOMINIQUE HUMBERT. Coopération, 22 avril 2004.
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