…Nous
fîmes face, avec diverses grimaces, à six provocations. Un titre
impossible. Un conglomérat de notations disparates. Des relents de
choses voisines du détritus. Des déversements en langue allemande, en
mauvais anglais, en sabir cybernétique. Des notes pour traduire les
passages en allemand. Une masse textuelle sans chapitres mais truffée
d’«inserts», fatras d’images piquées dans les médias. …Nous nous
sommes donc enfoncés dans cette jungle. Et bizarrement il devint
difficile de résister à un envoûtement. La foison, même repoussante,
était habitée. À chaque détour elle réservait des pépites, éclats
d’intelligence, aveux du deuxième degré, bonheur de formulation.
…Dans ces chemins qui ne mènent nulle part on apprend que l’auteur, lié
à la Suisse, tient un carnet. Ou des carnets. Au processus de
désintégration de notre société il oppose, «au gré des trottoirs», ses
notes et son collage obsessionnel d’images. …Au
fil des pages, les angoisses et dérèglements documentés de la planète
révèlent une ambiguïté. Ne s’agit-il pas du récit d’une folie
personnelle, confession d’un auteur qui, disant le moins possible sur
lui-même, finit par se laisser entendre? …Rosset moraliste. Humour
de Rosset. Sa force. Descente dans son enfer pavé de petites phrases
mémorables. Vaudois, 35 ans. Un écrivain d’aujourd’hui.
BERTIL GALLAND, 24 Heures
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