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Des poignées de temps passent dans ces pages.
De ce temps qui se dit tout à coup de mémoire et qui se récite dans les
images des êtres aimés, de ce qui reste d’eux dans les choses et dans
les jours qu’on croyait disparus. De ce temps aussi où s’est inscrit,
et sans qu’on le sache parfois, la trace d’un bonheur.
Ces poignées de temps qui reviennent et où se découvrent des mondes. Des matins se lèvent.
Maintenant
il voudrait s’avancer dans la mémoire des joies, celle qui est sans fin
quand elle court dans le passé des jours, qu’elle remonte dans les
chambres de l’enfance et qu’elle les traverse. Dans la voix du soir et
le dernier baiser. L’affection du sommeil. C’était aussi pour apaiser
les premières peurs des nuits, quand il faisait trop noir, qu’il y
avait trop de nuit : que les formes paraissent, transformant la chaise
et l’armoire, surgissant là tout à coup. Toutes ces joies qui
étaient venues dès le premier jour. Il se souvient. Ces merveilles qui
traversent les dimanches, elle tenait ses premiers pas dans les prés.
Un printemps. Elle lui rappellerait ses premiers mots. Mais ne dirait
pas aujourd’hui les veilles et les craintes, l’attente, ni dans les
ans, après, la longue journée répétée de l’espoir. Pourvu que ça aille!
Tout cela qu’elle sait par cœur.
Encore il revient à cet autre dimanche, plus tôt, quand il courait le
matin les champs de mai. Pour ce grand bouquet blanc et jaune, un peu
jaune, qui était à midi sur la table. Le bouquet ne serait jamais assez
grand pour le jour de fête. Déjà, se dira-t-il plus tard, quand on est
petit, c’est difficile tout ça: d’essayer de vraiment le dire à ceux
qu’on aime.
Il se dirait bien sûr qu’elle est la meilleure maman du monde et que ce
n’est pas une chose qui s’explique. Que ça se vit, c’est tout. Et que
c’est sûrement parce que l’infini est à portée d’elle, qu’avec elle le
monde commence, qu’il est toujours neuf, qu’il est à nouveau possible.
Tout cela qu’il se disait comme une fête quand la mémoire lui revient. Et qu’il la serre comme une promesse.
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Jean-Dominique Humbert est fribourgeois, rédacteur en chef adjoint de Coopération
et sculpteur d’instants rares. Ses proses poétiques cisèlent des
remémorations fines et mélancoliques: une clarté d’enfance, un silence
dominical, des bribes de voyages, une attente, un dernier souffle… Il
est à l’affût du temps, va et vient, nous traverse à pas de fantômes.
Et il en retient ces instants qu’il déplie doucement sur la page: c’est
un poète qui croit au pouvoir de la délicatesse.
MICHEL AUDÉTAT, L’Hebdo
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«L’utopie, c’est la confiance»
Une
suite de tableautins qui disent la présence au monde, la fragilité de
toute vie. Mais quelle densité d’écriture, dans ces récits!
Jean-Dominique Humbert livre un parcours marqué de petites touches
précises – et précieuses comme le miracle d’une fleur. Le tu de Si tu venais
s’adresse à chacun. «Et si c’était là, en fin de compte, que nous
devrions être? Exactement là où nous sommes. Si c’était là. Croire que
c’est là.»
La signature de JDH est bien connue des lecteurs de l’hebdomadaire Coopération.
Dans ces pages, le rédacteur en chef adjoint («pendulaire» entre son
bureau bâlois et sa maison de La Roche) prend le pouls du monde. Il en
retranscrit, avec sensibilité, les rumeurs et les humeurs – et souvent
par le biais de la littérature. Le voici de l’autre côté de la
barrière. Mais ce livre qui naît au printemps est loin d’être un coup
d’essai. S’il publie avec parcimonie, Jean-Dominique Humbert a signé
des ouvrages marquants. Plusieurs recueils de poèmes et (déjà) un
récit. Remontée du temps en sa compagnie. Avec L’Exilée, c’était une histoire de présence-absence au féminin. «Une quête», dit-il. Avec L’Étendue, c’était une traversée de la saison, la plaine, le champ «au sens musical»... Avec Vernicourt,
«c’était une maison de parole». Une maison idéale, mais qui allait
demeurer un rêve. Commentaire de l’auteur: «Étant heureux, on ne peut
le dire sur le moment. Ce n’est qu’après qu’on en prend mesure.» Avec Fribourg clair-obscur, il inaugurait la forme d’un récit suivi, une traversée de la ville.
Retarder la nuit
Repère temporel. Ce clair-obscur a été publié en 1998. Il y a tout
juste dix ans. Jean-Dominique Humbert ne s’en étonne guère: il aura
fallu dix ans de mûrissement pour que paraisse Si tu venais. Or, il est remarquable de constater que les mêmes thèmes «hantent» ce livre. L’absence. La traversée des saisons. La maison.
Dans cette maison, l’auteur revoit la silhouette du père, le
grammairien plongé dans un livre. Celle de la mère au jardin,
s’émerveillant devant une grappe de lilas. Les chères présences ne sont
plus. «Vous êtes à l’instant mon regard, ce soir de mars qui retarde la
nuit», écrit le poète. Et si les êtres chers se sont évanouis, les
objets parlent pour eux. Une plume, un disque, une nappe, un vase. Les
objets n’ont pas seulement les caractères de ceux qui les ont aimés.
Ils en portent l’âme.
Voyage intérieur
Et si la vie d’homme n’était que de l’enfance sans cesse revisitée?
Cependant, le narrateur va sa route. Il va le monde. Cette chambre
d’hôtel et de hasard, avec le globe de sa lampe où il déchiffre les
moments opaques. Il y a des mots qui font mal. Ces halls de gare où les
destins se croisent. Ce compartiment de train, où ses yeux lisent toute
une existence dans un seul regard.
Mais tout voyage est intérieur. Une introspection. Dans cette plongée
en soi, le calme alterne avec les brûlures de la conscience. «Tu
passeras ton matin à l’attendre. Mais ce n’est pas si grave, va.
Attendre, c’est déjà quelque chose, c’est dire qu’elle n’est pas
absente.» Tandis que certaines phrases claquent comme un fouet: «...On
ne comprend pas bien encore pourquoi ils font cela, pourquoi toute
cette violence déboule et qu’elle vient nous secouer, il en faudrait du
temps pour essayer de suivre ce qui se joue là pour de vrai, pour se
dire que la violence est une peur différée de la mort.»
La volupté d’écrire
Avec cette moisson d’images, comment le livre s’est-il construit?
Modeste, Jean-Dominique Humbert résume: «Tenter de faire de tous ces
récits... une phrase.» C’est en recourant aux poètes qu’il a ordonné le
livre. Quatre citations qui sont devenues les nervures des feuilles...
Avec Corinna Bille, enfermer la neige dans un coffret. Avec Samuel
Beckett, bénir les bruits qui font la beauté des jours. Avec Jean
Tardieu, retrouver la volupté de l’enfant qui trace des lettres. Et
avec Guillevic, cette petite merveille: «Il y a de l’utopie – Dans le
brin d’herbe – Et sans cela – Il ne pousserait pas.» Jean-Dominique
Humbert abonde: «L’utopie, c’est la confiance dans la vie.»
PIERRE GREMAUD, La Gruyère
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Des bribes de temps
Doux
comme le sourire de l’auteur, nostalgiques et languides, les
quarante-trois petits récits que Jean-Dominique Humbert publie sous le
titre Si tu venais travaillent la perception du temps. En
repensant à sa mère morte, aux joies des dimanches en famille, au
jardin coloré, à quelques voyages ferroviaires, Jean-Dominique Humbert
saisit quelques poignées de temps, des bribes éparses pour essayer de
comprendre «ce que nous devrions être» au présent. Tout ce que nous
avons ainsi accumulé dans une vie, se dit le poète fribourgeois,
devrait bien aboutir à quelque chose. Mais le doute surgit: «Ici les
mots viennent. Et passent. Se perdent. Tout est là: on croirait faire
un monde, et il s’éclipse d’une main de verre.» Se pose dès lors la
question de la possibilité du texte. D’une prose consistante. Elle ne
viendra pas ici, sans cesse diffractée par la résurgence du fragment,
l’interrogation de l’auteur. Paradoxalement, les bribes de temps
s’éternisent et l’écriture traverse le temps, désincarnée au présent,
voluptueuse dans le souvenir ému.
JACQUES STERCHI, La Liberté
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Surprenant mais vrai: on peut être rédacteur en chef adjoint d’un important hebdomadaire, Coopération
en l’occurrence, et, concernant sa carrière littéraire, d’une
discrétion qui frôle le dandysme. Et pourtant, Jean-Dominique Humbert
est bel et bien l’un des grands poètes de l’espace romand. Il publie
peu, mais bien, s’exprimant dans un domaine réservé, dit-on, à une
minuscule élite. Tout cela, c’est du baratin. Ouvrez Humbert et
laissez-vous bercer, il offre au lecteur un bain de bonheur pour l’âme
et l’intellect. De son premier recueil, Soliloque, paru en 1976, à ce dernier Si tu venais,
récits en prose, une constante qui oscille entre le rêve éveillé,
l’amour des choses, des êtres, de la nature, l’écriture hardie de
liberté et de précision, la beauté simple, suggérée en quelques mots.
En choisissant de courts textes, Humbert se révèle plus encore céleste,
ingénu mais pas trop, chantre de la vie dans ce qu’elle dissimule de
détails humoristiques ou touchants, dans l’effleurement des sensations
qui ne se disent qu’à contre-mots. Il y a du chuchotement chez le
Fribourgeois, des parfums subtils et des ivresses de mélancolie qui en
elle-même contient son contraire, l’enchantement. Construit en quatre
parties, quatre saisons, Si tu venais
lève le voile sur des temps à peine effacés. Les mois défilent,
métaphores de ces traces qui hantent les mémoires dont les hommes sont
les dupes. Mais les mois déroulent aussi des langueurs et des vigueurs,
des teintes pastel et des couleurs vives. L’émotionnel se dit mieux
dans le reflet de la flore et des larmes interprétées par Baudelaire.
La spontanéité de ces courts textes est apparente: certes, il y a le
iPod laqué de noir, et des baskets, et plus loin, un Boeing qui
atterrit à l’heure – Humbert n’est pas poète de Cro-Magnon, il est
résolument présent –, c’est néanmoins dans le regard sur les grappes de
sureau, ou l’autre, accroché dans «le vent des branches d’une allée de
platanes», que se maintient l’écho du rêve éveillé, ouvert vers cette
inconnue qui s’estompe au fil des pages. Est-elle juste un mythe ou le
sang de la vie court-il dans ses veines? Ode à l’amour, Humbert offre
un livre qui regorge de secrets, comme des stigmates enfoncés dans
l’oubli prochain.
BERNADETTE RICHARD, Le Quotidien jurassien
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Le nouveau livre, tout en finesse, de Jean-Dominique Humbert
Une profonde et belle musique se dégage des quatre séries de très fines proses constituant Si tu venais,
dixième ouvrage de Jean-Dominique Humbert dont sept sont des recueils
de poèmes à la voix très proche, intime, mais claire, dans une tonalité
qui rappelle à la fois Gustave Roud ou le Philippe Jaccottet des
promenades, avec un mélange parfois de préciosité, ici dépassée, et de
malice, à laquelle s’ajoute une sourde mélancolie, comme à l’instant
d’évoquer cette gare et «toutes ces gares qui vous reviennent, châteaux
des courants d’air, gares amies, gares juste une fois franchies, gares
endormies des premiers matins, gares amantes, gares éphémères, vite la
gare»… Humbles choses dans la lumière des jours, lumières tournant
avec le jour, saisons du présent et du souvenir, présence de ceux qu’on
voit aux premiers plans de la rue ou de ceux qui s’en vont (un père,
une mère tant aimée), citations (de Guillevic ainsi: «Il y a de
l’utopie / Dans le brin d’herbe»), esquisses de nouvelles («Comme une
histoire, enfin presque»), épiphanies
saisissantes de densité captée dans leur fugace «éternité» («Les
enfants avaient mangé près de la cabane»), tableautins empreints aussi
d’un humour frotté de cocasserie rappelant un Alexandre Vialatte: il y
a de tout cela, avec la nostalgie du «paradis révélé» dont parle
Baudelaire, dans ce petit livre dense et doux à emporter avec soi par
les forêts et le long des rivières, ou le soir dans un bar ou chez soi
dans la lumière qui s’en va…
JEAN-LOUIS KUFFER, 24 Heures
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Une brise délicate et poétique traverse les pages de Si tu venais
Poète et journaliste né à Fribourg, Jean-Dominique Humbert suit la vie à la trace.
Attendre. Ici, tandis que le temps passe, ou là, quand les autres ne
sont encore qu’hypothèses. Attendre et observer, puisqu’il s’agit aussi
de saisir chaque empreinte, chaque trace, et pour finir faire surgir du
moule une forme légère qui ressemble à la vie.
«La mémoire des joies»
La précipitation en moins, il y a chez Jean-Dominique Humbert un peu du personnage interprété par Charles Denner dans L’homme qui aimait les femmes,
auquel il emprunte d’ailleurs sa célèbre formule: «Les jambes de femmes
sont des compas qui arpentent le globe terrestre, lui donnant son
harmonie et son équilibre.»
Si tu venais ne
s’organise pas seulement autour de cette chorégraphie sensuelle. La
mémoire y mène sa ronde, les petits pas de l’enfance y résonnent et la
rencontre attendue – «Maintenant il voudrait s’avancer dans la mémoire
des joies, celle qui est sans fin quand elle court dans le passé des
jours…» – se méfie des chronologies convenues. «Il suffit d’être là
simplement dans la patience heureuse», écrit encore le Fribourgeois.
Cette «patience heureuse», image délicate et juste, possède l’évidence
poétique d’un vers de Paul Éluard.
Poète plus que romancier, Jean-Dominique Humbert est de ces auteurs qui
laissent «parler» leur écriture, soucieux de ne jamais en altérer le
souffle. C’est une brise qui traverse Si tu venais,
elle court des terrasses ensoleillées aux quais de gares, des étreintes
maternelles aux cimetières où vont s’étendre «ceux qu’on aime».
Finalement, l’attente dont il est ici question a ceci d’absolu qu’elle
se détourne de tout objet précis. Elle sait d’avance qu’il n’y a pas de
lieux à atteindre sinon l’espérance de ce lieu. Le conditionnel de Si tu venais ouvre avant tout sur lui-même.
LIONEL CHIUCH, Tribune de Genève
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Si tu venais
- S'il a été professeur, s'il est journaliste, Jean-Dominique Humbert
est d'abord poète. La poésie n'est pas dans son essence une manière
d'écrire mais une manière de voir le monde, d'en saisir le moment
précieux, l'instant où les choses vont peut-être basculer. Le «Si» du
titre marque cette fragilité des êtres et des décisions. Le poète donne
ici de courts récits qui forment une couronne de la fragilité.
«Écrire. Prendre l'air. Donner des nouvelles. Regarder les grappes de
sureau. Septembre. Le ciel. Relire ce livre qui commence par cette
citation : “Rien ne naît que d'amour, et rien ne se fait que d'amour.”
Écouter le monde. Essayer. Se demander. Voir la plus belle amie du
jour. Rassembler. Reprendre le temps. Le tien. Voir où va ce dimanche.
Aller jusqu'aux fleurs. Loin. Ici. Un homme, une femme. Des voix dans
la rue. Tu passes. Tu ne fais que passer.
Et si c'était là, en fin de compte, que nous devrions être ? Exactement
là où nous sommes. Si c'était là. Croire que c'est là.»
Blog de JEAN ROMAIN
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