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Roman de la passion amoureuse, Frida est un texte très prenant, tant par son style, personnel, ironique et direct, que par l’implication de son auteur.
Jeu entre discours intérieur, en italiques, et description minutieuse d’un cheminement personnel, Frida «sonne» juste et frappe fort.
Le lecteur y découvrira le chemin difficile qui mène de la «vie toute
tracée» à l’accomplissement amoureux, au péril de son équilibre.
Plongée en soi-même, ce texte touchera par la justesse de la description du comportement amoureux.
«Avant il y avait nous. Contre tous.
Aujourd’hui il y a toi contre moi. Moi contre toi.
Toi contre ma mère. Mon frère. Mes amis. Toi contre les chiens parce que ma mère les aime.
Moi contre ta mère. Ta sœur. Moi contre ton ex-femme. Moi contre cet
enfant que tu as eu avant moi. Moi et ton enfant contre toi aussi,
parfois.
Moi contre toi et toi contre moi et tu dis que c’est la passion qui
continue de nous dévorer et c’est plutôt beau. Moi contre toi qui te
crie que nos disputes sont celles d’un vieux couple, pas celles de
jeunes amoureux fous. Toi contre moi qui crois que je pense ce que je
dis.
Toi et moi, l’un contre l’autre. Serrés blottis aimants.
Je te hais et je rêve de partir. Je rêve de nos débuts en voulant y
retourner. Je rêve même d’y retourner avec un autre.
Toujours j’ai pensé que l’amour évolue vers la fin de l’amour.
Avec toi moins.
Avec toi je sais qu’hier matin je t’aimais follement, qu’hier soir je
te détestais, la nuit je te méprisais, le matin déjà moins, cet
après-midi je t’adore tendrement, ce soir je te désirerai à nouveau.
Jusqu’à tout à l’heure, nous, c’était toi et moi dans tous nos états.
Depuis tout à l’heure nous, c’est toi et moi et un petit bébé qui
grandit dans mon ventre. Et déjà nos états m’importent moins.»
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Comme un cri à étouffer
À 32 ans, Mélanie Chappuis publie son premier roman, Frida.
Concentré, il va à l’essentiel, au cœur des angoisses et des passions
d’une femme. Un discours intérieur sans artifice, entre impérieux
besoin de plaire et peur de n’être qu’illusion, où la jeune auteure a
mis beaucoup d’elle-même.
Mélanie Chappuis a mis trois ans pour achever son premier livre
«Ça a commencé par un cri.» Mélanie Chappuis explique la naissance de
Frida, son premier roman, dont on comprend qu’il avait un caractère de
nécessité impérieuse pour elle. Il fallait étouffer ce cri. L’écriture
y a aidé. Tout le texte, c’est sa première qualité, respire cette
nécessité. Mélanie Chappuis n’a pas mis beaucoup d’artifices dans la
voix de son personnage, dont on suit le discours intérieur tout au long
du roman entre passions, larmes, exaltation et vents contraires. Elle a
mis trois ans à l’écrire, ce livre qui a accompagné son chemin vers
plus de sérénité. «J’écrivais de temps en temps un paragraphe.» Il y a
donc, dans chacun d’eux, beaucoup de substances accumulées. Et pas
grand-chose de trop.
Tempêtes
La femme qui parle dans le livre aime avec passion, aime la passion,
aussi. Séduisante assurément, elle paraît, aux yeux de tous, assurer.
Puis elle plonge dans des gouffres lorsqu’elle aime celui qui ne l’aime
pas tandis qu’un autre qu’elle n’aime pas l’aime. «Ta douleur t’offre
une profondeur que tu es incapable de trouver en dehors de l’amour»,
peut-on lire. Cette femme a un impérieux besoin de plaire – «alors que
tu ne sais rien faire d’autre que de te faire aimer» – mais elle
supprimer le retour à la ligne?
a aussi peur de n’être qu’une illusion.
Elle ne s’appelle pas Frida. Le titre du livre vient de Ces gens-là de
Jacques Brel, avec cette Frida «qui est belle comme un soleil». Frida,
c’est, dans l’histoire, celui qui arrive pour enfin calmer les peines
d’amour et la difficulté à vivre de la narratrice. C’est l’élu qui
permettra de couper le chemin des angoisses. «Maintenant ça fait
longtemps, et merci de tout mon cœur. Pour l’enfant. Pour la drogue qui
n’est plus là. Pour le calme après les tempêtes. Pour l’amour partagé.
Pour l’enfant qu’on n’imaginait pas vouloir autant, avant…»
Cette femme est un concentré – non pas de la femme amoureuse – mais du
chemin traversé par certains avant de trouver ce qui apaise l’angoisse
d’être et qui calme les tempêtes intérieures.
Mélanie Chappuis a mis beaucoup d’elle-même dans ce roman. «Pour
l’instant, j’écris avec ce qui m’arrive», commente-t-elle. Après trois
ans de travail, elle est enfin arrivée au bout de son premier livre et
a décidé de le publier: «Pour une fois, je n’avais pas honte de mon
texte. J’ai donc envoyé mon manuscrit à Bernard Campiche, je lui
faisais confiance pour qu’il me dise vraiment ce qu’il pensait.»
L’éditeur a décidé de la publier.
Deux livres en chantier
Les livres où l’on met beaucoup de soi-même ne sont pourtant pas sans
danger. Dans l’ensemble, les critiques se révèlent positives, et ce
n’est pas anodin pour Mélanie Chappuis: «J’écris parce que ça me fait
du bien, mais je publie parce que je suis contente de ce livre et que
j’aimerais le partager. Je vois que des gens apprécient. Ces retours
sont importants.»
Mélanie Chappuis ne veut d’ailleurs pas en rester là et travaille sur
deux nouveaux romans. «Dans Frida, on n’entend que la voix de la
narratrice. Dans le prochain, on découvrira l’histoire avec les voix
des différents personnages, mises en parallèle. Je me place dans la
peau d’un homme de cinquante ans et ça me plaît beaucoup.»
Le deuxième des livres en cours est inspiré par ses deux enfants en bas
âge. Son sismographe intérieur est frappé par la puissance de l’amour
que les parents portent à leurs enfants, «on dit que l’amour de la mère
pour un enfant est merveilleux, c’est vrai, mais il est aussi
angoissant: c’est tellement fort». Et elle commente, perplexe: «Une
mère aime toujours les enfants, le contraire n’est pas toujours vrai.»
«Prendre et donner un maximum»
Après des études de lettres à Genève – précédées par une année à
l’Université de Fribourg – Mélanie Chappuis a suivi un DEA à l’Institut
européen, puis a écrit des piges pour différents journaux, dont la Tribune de Genève.
Aujourd’hui, elle travaille à la Radio Suisse Romande. Fille d’un
diplomate suisse, elle a grandi entre le Guatemala, le Nigeria,
l’Argentine, Berne et New York, avant le début de ses études
universitaires. De ses voyages et des escales de quatre ans qu’elle a
faites dans la plupart des lieux où elle est passée – «mais je ne veux
pas faire de la psychologie à deux francs» – elle a gardé une habitude
de «prendre et de donner un maximum dans la vie».
CHARLY VEUTHEY, La Gruyère
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Un trop-plein de sentiments. Un miroir non condescendant (le livre) qui
les recueille. Une femme, la narratrice, qui aime dans la souffrance ou
la révolte plutôt que dans l’indifférence, l’agacement ou l’habitude.
«Je», «tu», «nous», l’auteur brouille les pistes pour tenter de donner
une image conforme à ce que les hommes attendent d’elle. Une belle
image.
Lentement, tout s’éclaire. La passion d’un homme qu’on n’aime pas («le
mari»), la passion pour un homme qui ne vous aime pas («l’amant»), le
désir passager pour un homme avec lequel on partage l’absence de
passion («l’ami amoureux») et enfin, le meilleur pour la fin, la
passion partagée, avec ses moments d’exaltation, de dépendance, de
folie, de crainte de tout perdre, de tendresse et de haine.
La narratrice analyse sur le vif chacun de ses sentiments. Aucun écran
n’est interposé entre elle et le lecteur. En apparence, elle lui livre
la primeur de ses pensées, sans filtre. Mais, dans le même temps, son
style témoigne d’une grande mise à distance. Une certaine pudeur,
soutenue par l’absence de tout recours à des noms propres ou à des
adjectifs possessifs, est ainsi révélée. En ce paradoxe somptueusement
maîtrisé réside tout son talent. Il consiste à démonter les mécanismes
de la passion… pour mieux tomber dedans.
VALÉRIE LOBSIGER, Bibliotec’art
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Elle était passée comme stagiaire à dimanche.ch,
journal qui n’existe plus. Déjà cette drôle de fébrilité en elle, une
veine de passion sous le visage apparent du calme. Ensuite, je l’ai
revue aux coïncidences étranges, les croisements de la vie. Elle a
publié ce printemps un premier roman comme elle: les étreintes fébriles
ou de hasard encore, y tenir, y succomber, y espérer, s’y trouver
peut-être. Le titre, c’est Frida, sa manière de raconter des
métamorphoses, une écriture un peu haletante, cherchant la vérité. Il y
a cette phrase belle, page 15: «Oublie celui qui n’aime pas.» Il faut
se répéter ça tous les jours.
CHRISTOPHE PASSER, L’Illustré
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Règlement de comptes avec l’amant
Premier roman de la journaliste lausannoise Mélanie Chappuis, Frida
s’apparente plutôt à une longue missive adressée à un amant. Règlement
de comptes, comme l’on dirait: pour solde de tous comptes. Il y a là la
narratrice, jeune femme blessée par l’abandon. Il y a eu le mari, puis
cet amant si séduisant mais si volage. Et puis d’autres amants de
passage pour tenter d’émouvoir le seul qu’elle regrette avoir perdu. Et
puis la promesse d’un enfant… Bref, Mélanie Chappuis entraîne le
lecteur dans une danse fébrile pour tenter de comprendre comment ça se
passe, côté relations amoureuses, et pourquoi les histoires d’amour
finissent mal – en général – comme le dit la chanson! Une litanique
histoire de tromperie et de bassesses, d’éclairs de beauté et de
possible apaisement, le tout assez convenu quant au fond. Côté forme,
le livre intéressera de par sa langue nerveuse, ses phrases courtes,
ramassées, haletantes parfois. Signifiant l’effort, la volonté de tout
dire, de tout mettre sur la table, implacablement, dans une minutieuse
chronologie des sentiments. Peu à peu, Mélanie Chappuis a entrelacé à
ce récit une voix intérieure en porte-à-faux, qu’un changement de
typographie signale.
JACQUES STERCHI, La Liberté
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Roman de la passion
«Avant
il y avait nous. Contre tous. Aujourd’hui il y a toi contre moi. Moi
contre toi. Toi contre ma mère. Mon frère. Mes amis. Toi contre les
chiens parce que ma mère les aime. Moi contre ta mère.» Ainsi écrit
Mélanie Chappuis, dont paraît ici le premier roman dont le ton, d’une
cinglante ironie, signale aussitôt une patte. Alternant discours
intérieur et récit objectif, le livre suit l’âpre chemin qui mène de la
vie «toute tracée» à l’accomplissement d’un amour, au risque de son
équilibre.
JEAN-LOUIS KUFFER, 24 Heures
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Mon choix
C’est
un peu le roman de la quête amoureuse que ce premier livre évoquant
d’abord la valse-hésitation d’une jeune femme mariée, un brin
emmerdeuse, hésitant entre celui-ci et celui-là, qui devient plus
intéressante quand elle rencontre enfin celui qu’elle attendait. D’une
jolie écriture, un peu «surécrit» parfois, le livre vaut du moins par
une finesse de perception et toutes sortes de notations dans lesquelles
les gens se reconnaîtront. Bref, c’est une lecture sympathique, à
consommer comme d’autres livres destinés à agrémenter les prochaines
journées d’été.
CLAUDE AMSTUTZ, Mon choix, 24 Heures
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Les amants
Dès
les premières lignes, le style intrigue, et puis la force des mots
annonce une fièvre amoureuse contagieuse. Une écriture intérieure,
ciselée avec finesse, laisse éclater une spontanéité étrangement
familière. Ici ce sont les maux d’une femme qui passe des mains de
l’amant qui ne l’aime pas à celles de celui qui l’aime, pour tout
doucement trouver le chemin vers la sérénité salvatrice. D’une
intensité rare, cet écrit couche sur le papier le chagrin et l’espoir
d’une femme, de toutes les femmes, dans la mécanique implacable de
l’amoureuse.
ZOHRA KARMASS, Edelweiss
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Mélanie Chappuis. Avec Frida,
premier roman paru chez Bernard Campiche, Mélanie Chappuis nous plonge
dans le tourbillon complexe de la psyché féminine. Un livre aussi
vertigineux que son auteur.
Portrait
La belle à la plume
Identité.
Mélanie Chappuis est née à Bonn (D) par hasard, le 13 janvier
1976. Un frère (dont elle est fière) et qui tient un restaurant à
Verbier. Mariée, deux enfants, Quentin et Paloma. Journaliste à la RSR.
Exode(s).
Elle a vécu au Guatemala, au Nigeria, en Argentine, aux États-Unis.
Établie aujourd’hui au bord du lac Léman, près de Lausanne.
Formation. Lettres à Genève, puis l’Institut européen de l’Université de Genève.
Inspiration.
Zweig, Cohen («que j’aime à la folie»), Duras, Roth, Huston, Nothomb
(«le seul auteur intelligent que l’on peut lire en une heure à la
plage»).
Elle l’a dit. «Ma façon d’aimer les gens, c’est de les engueuler.»
Son livre. Frida, roman, Bernard Campiche Éditeur, 2008.
Coopération.
L’héroïne de votre livre dit: «Mes cheveux coupés court pour ressembler
à ma douleur.» Vous aussi vous portez les cheveux courts.
Mélanie Chappuis. (Elle sourit) La narratrice n’est pas l’auteur, contrairement à ce que tout le monde croit. Je vais bien. Merci.
«Ne pas être aimée, c’est être libre» page 21. Plutôt bouddhiste, comme point de vue.
Ah
bon? Non, j’ai besoin qu’on m’aime énormément! Mais l’absence d’amour a
un côté libérateur. Il faut rendre la pareille aux gens qui nous
aiment. C’est du donnant, donnant. Quand personne ne nous aime, il n’y
a pas de responsabilité.
D’où vient cette fatigue dans vos lignes?
Et là, dans vos yeux?
La
fatigue d’aimer toujours passionnément et de se perdre dans ses
passions. Mais on est toujours un peu dans la caricature quand on
écrit. La narratrice est fatiguée de se perdre autant dans l’amour, de
se donner autant, et d’être déçue. Elle se hait parfois, se trouve
ridicule dans sa façon d’aimer. Par exemple, elle se met dans tous ses
états pour un inconnu qu’elle vient de croiser, et elle se déteste pour
ça.
Le cynisme des hommes vous révolte?
Le
cynisme n’est pas la première caractéristique négative que je
soulignerais chez l’homme. Les hommes sont plutôt lâches et égoïstes
que cyniques. Les femmes ont plein d’autres défauts, mais elles ne sont
ni lâches ni égoïstes.
Vous connaissez la gent masculine comme si vous l’aviez étudiée pendant un siècle.
Je
suis une grande amoureuse. J’ai vécu mon premier grand amour à cinq
ans. Lui, il en avait onze, et je l’aimais à la folie… Mon premier
grand amour était aussi ma première grande souffrance. Mais je ne sais
pas si j’ai répondu.
S’agit-il d’amour, ou tombez-vous seulement amoureuse?
Je
tombe amoureuse. Pour aimer vraiment quelqu’un, il faut dépasser le
stade de la passion et j’ai toujours eu du mal à dépasser ce stade-là.
Il n’y a que mon mari que j’ai vraiment aimé. (Silence) Vous
savez, on part moins vite quand on a des enfants. Ce qui nous permet de
rester malgré les défauts de l’autre, de découvrir d’autres qualités et
éventuellement de retomber amoureuse. Cela m’est arrivé avec mon mari,
et seulement avec lui.
Vous dites cela comme si vos enfants vous avaient sauvé la vie.
Oui.
Dans un certain sens. J’adore mes enfants, vraiment, ils sont un
bonheur immense! Mais hier encore je me disais: «Oh, si seulement je
pouvais revenir trois ans en arrière!» Des fois c’est désespérant
d’avoir une telle responsabilité. Je suis quelqu’un de si inquiet avec
mes enfants. J’ai peur qu’ils ne soient pas bien, qu’ils manquent de
quelque chose, qu’ils ne m’aiment pas… Parfois je suis proche de la
panique…
Qu’est-ce qui vous manque?
Le
calme. J’aimerais être plus calme. Cela dit, l’angoisse m’a fait perdre
tous les kilos de la grossesse. C’est le bon côté de mon caractère.
Manquez-vous de confiance en vous?
Oui, et j’ai de la peine à le cacher. Je doute constamment. De moi, des autres. De moi d’abord.
La vie est un combat?
Un combat pour s’accepter, se faire accepter. Sans trop se poser de questions, sans douter constamment. (Elle enfouit ses mains dans les cheveux) Oh, je suis tellement changeante… tellement pleine de contradictions! Je ne sais jamais où je me situe. C’est dur.
D’où vient cette instabilité?
Je
suis un enfant de diplomates. Quand on change tous les quatre ans de
lieu, de langue, d’odeurs, de nourriture… il faut se dépêcher d’aimer,
de se faire aimer, il faut prendre le maximum avant que ça ne se
termine. Cette urgence, on l’emporte dans sa vie d’adulte. Il y a des
gens qui vivent vingt ans dans le même endroit. Moi, je ne sais pas ce
que c’est. Cette urgence a fait la femme que je suis aujourd’hui.
C’est-à-dire un survivant qui n’est pas placé dans des conditions de survie? Et ça vous emmerde.
(Silence) C’est excellent ce que vous dites. Je n’ai pas de réponse. Il y a toujours des raisons de lutter, malgré les apparences.
Des raisons humanistes?
J’aime
aller vers les gens et je ressens de la compassion. Mais je ne suis pas
capable d’un vrai engagement, notamment pour des causes humanitaires.
En tout cas pour le moment. J’ai un côté très nombriliste, je me prends
beaucoup d’énergie.
Pourquoi cette distance avec le monde?
Je
suis journaliste, mais l’actu en elle-même, je n’en ai pas grand-chose
à cirer. Ce sont les gens qui la font qui m’intéressent.
La narratrice dit:
«Mon seul talent est de faire illusion.» Le vôtre, c’est l’écriture?
Je
ne sais pas. J’ai écrit un livre, c’est déjà ça. Mais je ne sais pas si
je suis écrivain. J’attendrai de finir mon deuxième livre pour le
savoir.
Votre plume ouvre les trappes de la psyché féminine comme jamais depuis Jane Austen. Vertigineux.
Une découverte? (Elle sourit)
Je parle facilement de moi. Je n’ai rien à cacher. Mais comme j’ai tout
le temps besoin d’être rassurée, je parle de moi pour qu’on me rassure.
C’est un défaut que j’ai: je n’ai pas de peine à me dévoiler. (Elle s’interrompt) C’était quoi votre question?
Je ne comprends rien à votre réponse, Madame. Mais j’aime ce que vous avez dit.
Voilà le grand miracle féminin, Monsieur.
PABLO DAVILA, Coopération
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Frida
– Sur la couverture, il est indiqué roman mais ce bref écrit se
rapproche plus d’un récit, voire même d’un journal intime. Le titre, Frida,
est une référence à la chanson de Jacques Brel. La narratrice raconte
sa vie amoureuse avant la naissance des enfants, qui viendront tout
bouleverser. Les hommes traversent sa vie au rythme de ses sentiments
mi-partis de naïveté et de lucidité, jusqu’à l’heure où elle rencontre
enfin l’unique, celui pour lequel elle décide qu’il n’y aura plus
d’après. L’écriture alerte jette des impressions et finit par dessiner
la vie turbulente d’une jeune femme qui vient d’avoir la trentaine.
«Toi et moi, l’un contre l’autre. Serrés blottis aimants.
Je te hais et je rêve de partir. Je rêve de nos commencements en
voulant y retourner. Je rêve même d’y retourner avec un autre.
Toujours j’ai pensé que l’amour évolue vers la fin de l’amour.
Avec toi moins.
Avec toi je sais qu’hier matin je t’aimais follement, qu’hier soir je
te détestais, la nuit je te méprisais, le matin déjà moins, cet
après-midi je t’adore tendrement, ce soir je te désirerai à nouveau.
Jusqu’à tout à l’heure, nous, c’était toi et moi dans tous nos états.
Depuis tout à l’heure, nous, c’est toi et moi et un petit bébé qui
grandit dans mon ventre. Et déjà nos états m’importent moins.»
Blog de JEAN ROMAIN
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À son premier roman, à l’écriture souple, fluide et concise, et intitulé Frida,
Mélanie Chappuis a placé en premier exergue quelques paroles d’un petit
air de Brel, un air ni ancien, ni languissant, ni funèbre, comme celui
de Nerval, mais un air plutôt ensoleillé, qui laisse cependant sourdre
quelques assombrissements, assombrissements confirmés par le second
exergue, une citation en forme de question de Duras, qui paraît
désinvolte, mais dont la réponse confirme les incertitudes de toute
relation amoureuse.
C’est que dans Frida, la
relation amoureuse entre les amants, puis époux par devant curé, est
originellement tellement forte et semée de doutes qu’elle n’est que
tumultueuse. On s’aime, on s’adore, on se déteste, on se hait. Tout se
passe vite, s’enfle, explose et s’effondre pour reprendre le même
chemin tout parsemé de roses et d‘épines, plombé par l’introspection et
l’incertitude, les flèches de l’amour et les stylets de la haine. Et le
doute, un doute constant et omniprésent. Frida est toute la passion amoureuse, cette Leidenschaft des romantiques allemands, vécue avec les mêmes affres, mais augmentées par les télécommunications.
Tout le roman est cri, le cri de douleurs d’un coeur déchiré et d’un
corps torturé, que les amants essayent de raffermir par de délicates
attentions et des étreintes renouvelées. Qui ni les unes ni les autres
n’apportent l’apaisement escompté. À tant souffrir, l’amante pourrait
sauter d’une tour comme Tosca, se gorger de daturas comme Lakmé, ou
utiliser la dague comme Cio Cio San ou Lucia. Mais elle est jeune, elle
est forte, elle est belle, et elle a lu quelques bons maîtres. Saint
Augustin, tout d’abord, dont elle a retenu la glose sur la tristesse
humaine post coïtum. Et la joie de vivre du sépharade Albert Cohen, à
tort taxé de misogynie, (mais Mélanie est jeune encore), et dont
l’Ariane, aux fameuses robes voilières, et issue d’une de trente
familles genevoises – il n’y en avait que treize à Trieste selon Blum
Pacha II - créent encore quelques tumultes de douarières entre Cologny
et Genthod. Elle est ivre de vie et d’espérance. Entre deux disputes et
deux réconciliations. Un interlude qu’elle utilise cependant pour
conseiller à l’amant de lire le Traité sur l’Amour et l’Occident,
de Rougemont, dont la sécheresse calviniste si desechante laisse peu à
penser qu’il eût pu connaître un amour partagé comme il l‘a vécu. C’est
sans doute à dessein que l’amante pousse l’amant devenu époux à lire
Rougemont et non pas Kazantzakis et les récits de sa passion débridée à
Berlin, ni les poëmes, encore plus lascifs que ceux de Constantin
Cavafy, du calife lettré Haroun Al-Rachid, ami de Charlemagne.
C’est qu’elle sait que cela ne servirait à rien, tant il est vrai que
les gens ne changent pas et que malgré tout nos efforts à étreindre un
corps entre nos bras ou à placer une âme contre notre poitrine nous
restons toujours seuls, comme le soulignait déjà Maupassant, bien avant
le Horla. Dans Frida
tout est brûlant, tout est lucide, tout est espérance. Car malgré les
déboires et les déceptions, l’amante espère, espère toujours, et espère
que depuis l’attente d’un enfant tout va s’améliorer, que cela va
devenir todo azul comme on le dit au Brésil, même dans les situations les plus effroyables et jusque dans les favellas. Le bonheur va arriver, il est presque là.
Et il va enfin durer. Semble-t-il , espère-t-on pour l’amante et
l’amant. C‘est alors que les deux derniers mots du court roman Frida de Mélanie Chappuis tombent comme un couperet : OU PAS. On ne peut qu’ajouter : Inch Allah.
BERNARD BOCHATAY
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Texte
haché, nerveux, ironique et douloureux à l’image de cet amour qui lui
échappe. L’auteur nous raconte à la fois son discours intérieur (en
italique) et le difficile chemin qu’elle doit parcourir pour aller
d’une vie «normale» vers ce périlleux accomplissement. Les notations
sont très justes et la description du mal d’amour d’une précision
impressionnante.
JULIETTE DAVID, Suisse magazine
Vous pouvez nous commander directement cet ouvrage par courriel.
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