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Théâtre en camPoche publié en partenariat avec la Société Suisse des Auteurs (SSA) se décline en deux volets: RÉPERTOIRE et ENJEUX.
RÉPERTOIRE réunit des pièces d’un même auteur, en un ou plusieurs volumes.
ENJEUX rassemble
plusieurs pièces d’auteurs différents qui viennent d’être joués ou qui
vont être représentés prochainement dans les théâtres de Suisse
romande. Le choix est forcément subjectif. Il appartient au directeur
de collection et à l’éditeur de répondre ou non à la demande d’édition
des auteurs ou des théâtres. Il se voudrait cependant le plus objectif
possible, fondé sur les seuls critères de qualité et de
représentativité des écritures d’aujourd’hui et de maintenant.
ENJEUX est d’une certaine manière une revue théâtrale. Sous la forme du livre Théâtre en camPoche habituel,
il sera possible de s’y abonner pour recevoir régulièrement ses
parutions au printemps et à l’automne de chaque année. Une manière
pratique et très simple d’être tenus régulièrement au courant des
écritures théâtrales de ce coin de pays. Cette première livraison
rend compte de la vitalité des écritures contemporaines en Suisse
romande. Quatre pièces de quatre auteurs (dont trois femmes) qui seront
créées durant la saison 2005 – 2006 dans quatre théâtres de Lausanne et
Genève.
Il est heureux de constater que les directions des théâtres considèrent
maintenant comme essentiel de produire, en grand nombre et en création,
les auteurs d’ici. ENJEUX sera, dans la mesure du possible, la vitrine éditoriale indispensable à cette reconnaissance.
PHILIPPE MORAND, directeur de la collection Théâtre en camPoche
«Parce
qu’il y a plus de dynamisme chez les dramaturges que chez les
romanciers de la région», Bernard Campiche publie le premier volume de
la collection Enjeux réunissant quatre pièces romandes. On y découvre KilomBo,
le dernier-né de Sandra Korol, trente ans, un regard à la fois tendre
et féroce sur la brutalité des hommes porté par deux femmes
prisonnières d’une fosse à ordures. Mêlant sa sensibilité de comédienne
à une conscience féminine déjà révélée dans l’écriture d’Un temps pour tout, joué par la compagnie Vitriol, la pièce a su séduire le Théâtre de Vidy qui l’accueillera en mars prochain. Enjeux, c’est aussi, notamment, la redécouverte sur papier de la pièce Les mots savent pas dire, de Pascal Rebetez, qui a fait dernièrement salle comble au Poche à Genève.
PHILIPPE MARTHALER, Le Temps
«Cette
nouvelle collection de textes de théâtre contemporains suisses, très
bien présentée, est l’occasion de suivre de près le travail de nos
auteurs, et de découvrir notamment deux pièces récentes qui ont fait
l’objet d’une mise en scène.
KilomBo, de Sandra
Korol, à voir bientôt à Vidy, nous révèle une écriture qui rappelle
Beckett, avec sa touche et sa vision personnelles, tandis que Les mots savent pas dire de Pascal Rebetez, créée au Poche-Genève, nous font pénétrer dans un univers «brut» fascinant.»
FRANÇOIS MARIN, «Mon choix», 24 Heures
Nouveau théâtre romand
La collection Théâtre en camPoche met en avant quatre auteurs suisses romands, dont les pièces encore inédites seront ises en scène cette année.
Nous connaissons le magnifique texte de Pascal Rebetez Les mots ne savent pas dire, mis
en scène au Poche-Genève en octobre 2005, inspiré de planches gravées
par un marginal, exposées au Musée de l’art brut. S’y ajoutent trois
pièces, aux dialogues incisifs et ironiques, œuvres de trois femmes.
Toutes mettent en scène des personnages féminins délaissés, avec leurs
fêlures, en attente de l’étincelle qui changera leur vie.
Chez Sandra Korol, dans KilomBo
(qui sera créé au Théâtre Vidy-Lausanne en mars prochain), deux femmes
survivent dans les ordures et guettent le prince charmant. On pense à
du Beckett au féminin.
Dans Les Bouches de Valérie
Poirier, Lili, Félicité, et Zora espèrent en bordure du monde, dans un
hôtel pouilleux, rêvant au moyen de combler l’absence qui plombe leur
vie, jusqu’à l’arrivée d’un visiteur prodigue. Enfin, Manon Pulver met
en scène deux riches boxées qui s’envoient des vannes dans un salon de
coiffure digne de Jacques Tati: Au bout du rouleau se veut
critique de «la société de consumation» et du vide affectif.
Intelligents et sensibles, ces quatre textes témoignent d’un renouveau
prometteur.
JULIEN BURRI, 24 Heures
Enjeux 1
Théâtre suisse d’aujourd’hui
Enjeux
rassemble plusieurs pièces d’auteurs différents qui viennent d’être
jouées ou qui vont être représentées prochainement dans les théâtres de
Suisse romande. Enjeux est d’une certaine manière une revue
théâtrale. Sous la forme du livre Théâtre en camPoche habituel, il sera
possible de s’y abonner pour recevoir régulièrement ses parutions au
printemps et à l’automne de chaque année. Une manière pratique et très
simple d’être tenus régulièrement informés des écritures théâtres de ce
coin de pays.
CORINNE JAQUET, Journal de Veyrier
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SANDRA KOROL
KilomBo
(Création au Théâtre de Vidy, à Lausanne, en mars 2006)
Enfermées
sous terre et chargées de manger les ordures qu’un camion déverse
au-travers d’un tuyau, Gorda et Nena se racontent l’une à l’autre
au-travers de souvenirs dont on ne sait pas s’ils sont réels et de
rêves auxquels on ne peut s’empêcher de croire.
Ainsi,
Gorda, la vieille, narre à Nena, la petite, le monde d’en haut, celui
d’où viennent les ordures. Un monde fait de guerres et de
légendes dont Nena n’a plus le souvenir, mais qu’elle souhaite tant
rejoindre. Au-milieu des demi-vérités, des jeux de rôle, des débris et
des rats, la chose dont on ne cesse de parler, c’est d’amour.
L’amour qu’Il voue à Gorda, Lui, qui a promis jadis de la sortir de son sous-sol, bientôt, bientôt…
L’amour
dont Nena manque tellement mais avec qui elle est certaine d’avoir
rendez-vous, là-haut, à la surface. Un amour qui la cherche en frappant
la terre de ses mains.
Et puis, un
jour, une lettre atterrit au milieu des ordures. Comme ça. Simplement.
Une lettre adressée à Nena, la petite. Une lettre d’amour. D’un certain
KilomBo. KilomBo qui la cherche en frappant la terre de ses mains.
Alors, soudain, les histoires d’amour se transforment en histoires de combats.
KilomBo
est le récit de tout ce que nous sommes capables de mettre en place
pour échapper à ce qui doit être vécu ; de toute l’énergie
que nous employons à tordre la réalité pour la faire correspondre à un
scénario interne dont nous pensons, non seulement, qu’il doit être le
nôtre pour toujours, mais aussi, qu’il est applicable aux autres.
Sandra Korol naît
à Genève en 1975, d’une mère suisse et d’un père russo-argentin. Un
mélange des données de base qui la font pencher naturellement vers un
besoin profond d’éclectisme. Ainsi, après des études de philosophie, de
littérature anglaise et de droit à Fribourg, elle enchaîne avec une
formation professionnelle d’art dramatique au Conservatoire de Lausanne
dont elle sort en 1999. Dès lors comédienne de théâtre et de cinéma,
elle touche également à la mise en scène, enseigne le théâtre, œuvre en
tant que journaliste free-lance pour divers magazines, et travaille
pour la télévision suisse romande en culture et en divertissement.
L’écriture fait irruption dans sa vie par inadvertance presque, à la
suite de l’envoi d’un projet hypothétique dans le cadre d’un concours
lancé par la Société Suisse des Auteurs et la Radio Suisse Romande.
Sélectionnée, elle part en résidence aux Maisons Mainou, dans le canton
de Genève, et y écrit sa première pièce, Soledad, une dramatique produite par Espace 2 au mois de juin 2001. Elle poursuit avec la pièce Sismen,
jouée à Vevey en 2002, et, la même année, reçoit la bourse SSA de
soutien à l’écriture théâtrale contemporaine avec son projet 20 Petits Contes Miracles et un épilogue. En 2004, elle participe à la première version du projet «Textes en Scènes» et écrit Salida
sous l’égide du dramaturge Jean-Marie Piemme; quelques mois plus tard,
elle est lauréate du prix romand de littérature initié par le magazine Profil.Femme, avec la nouvelle RaNa.
En 2005, elle écrit la pièce Un temps pour tout qui est jouée au théâtre 2.21 à Lausanne par la Cie V.I.T.R.I.O.L. dont elle est l’une des co-fondatrices.
«Racontez-moi une histoire drôle!»
Tout sourit à Sandra Korol (31 ans). Sa pièce «KilomBo» est jouée à Lausanne. Rencontre.
Elle
aime rire, Sandra Korol. À peine rencontrée, voilà qu’elle vous lance:
«Racontez-moi une histoire drôle, Monsieur l’intello!» Pourtant il y a
parfois une pointe de tristesse dans son sourire, comme une ombre
passagère. «J’ai reçu pas mal de claques. Je suis allée les chercher!
La volonté de survie est née en moi devant la menace, quand on m’a dit:
Tu n’as pas ta place dans le théâtre.» Sandra Korol a bien fait
d’insister, sa très belle pièce KilomBo est mise en scène au Théâtre de
Vidy à Lausanne et elle est publiée aux Editions Bernard
Campiche. (voir ci-dessous). Ici, à Vidy, elle connaît tout le monde,
ses aînés l’ont prise en affection. Depuis une année, cette comédienne
ne monte plus sur scène mais écrit pour le théâtre. Elle a aussi
découvert le cinéma et joué dans le film de Laurent Nègre, Fragile, qui
sort ce printemps, aux côtés de la star Marthe Keller. «J’ai commencé
le droit, c’était terrible. Je suis allée au conservatoire, j’ai eu des
petits rôles, et puis on m’a commandé une pièce et l’écriture a fait
irruption dans ma vie.» Dans le foyer du théâtre, devant un café,
elle fait partager sa passion. «C’est mieux que la Playstation! C’est
ce qu’il faut dire aux jeunes. Il faut du courage pour venir au
théâtre. C’est un sport qui demande de la pratique. L’imaginaire ne
s’achète pas! C’est un muscle qui pourrit si on le délaisse.» Elle
espère en tout cas que tout le monde recevra quelque chose à la fin de
KilomBo. Et Korol, ce beau nom, d’où vient-il? «Mes origines, c’est un
boxon terrible! (rires) Mais ça donne des bâtards qui sont résistants à
la pluie et au vent!» Elle déplie son arbre généalogique. «Mon père est
russo-argentin, ma grand-mère roumaine.»
Pourtant, Sandra Korol est née en Suisse. «Mon père a fui l’Argentine
au moment de la dictature. Ma mère est Suisse-alémanique d’origine
prussienne, voir Gitane!» Korol veut dire «roi» en russe. C’est vrai
qu’il y a quelque chose de royal en elle, un léger détachement, une
assurance. La redécouverte de ses racines a une influence sur la jeune
femme. «Plus je découvre ce qui c’est passé dans ma famille, plus je
vois des rapports avec mes textes: filiation, guerre, recherche de la
mémoire.»
Sandra Korol aime les coïncidences, sait saisir les occasions. «Le
hasard n’existe pas. Il faut être à l’écoute.» Un peu mélancolique,
elle constate: «Les autres ne font pas notre malheur. Ni notre bonheur.
Tout vient de nous.»burn-out capillaire, où s'effilochent les liens qui relient deux individus – en l'occurrence deux femmes – à leur image d'elles-mêmes.
La comédie des apparences et de la fuite en avant est ici poussée jusqu'à son paroxysme peroxydé: deux
femmes expriment leur ratage personnel dans un dialogue destructeur et
burlesque à la fois, entre désir de manipuler et besoin de confesser…
JULIEN BURRI, Coopération
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L’éclosion d’un grand talent
C’est toujours un bonheur que de saluer l’apparition d’un nouveau
talent, et notamment lorsque celui-ci rayonne avec autant de
sensibilité et d’intelligence que celui de Sandra Korol, à la fois
comédienne de théâtre et de cinéma, metteuse en scène et auteure
dramatique. À ce dernier titre, la jeune Lausannoise (d’adoption,
puisqu’elle est née à Genève de père argentin aux origines
russo-roumaine et de mère alémanique de souche gitane) a déjà huit
pièces à son actif, dont la troisième, KilomBo, sera représentée dès le
7 mars à Vidy.
«J’ai toujours rêvé d’être actrice », nous confie Sandra Korol dans son
petit deux pièces-cuisine de jeune femme vive et nette, qu’on sent à la
fois ouverte et décidée, précise et réfléchie dans ses propos. Sans
l’ombre d’un complexe, elle se rappelle que c’est les représentations
d’«Au théâtre ce soir», à la télé, et les pièces de boulevard qu’elle
allait voir avec ses parents qui ont tissé sa première culture
théâtrale. De père médecin enfui d’Argentine dès le début de la
dictature - il n’eût pas manqué d’être arrêté pour ses positions
révolutionnaires -, Sandra Korol n’a pu aborder avec lui cet aspect de
son ascendance que sur le tard, avant un séjour en Argentine où elle
retrouva sa famille (dont plusieurs acteurs connus) et écrivit KilomBo… en deux semaines.
De solide formation classique (latiniste au gymnase fribourgeois de
Sainte-Croix, puis aux facs de Lettres et droit où la philo et la
criminologie - «pour comprendre la source du mal» - faillirent la
happer), Sandra Korol a retrouvé presque fortuitement le fil rouge de
sa première aspiration. Un examen raté coïncidant avec les
retrouvailles d’une amie devenue comédienne, une inscription de
dernière minute au Conservatoire, les rencontres de trois personnes
qu’elle reconnaît pour «maîtres» successifs (Gérard Diggelmann qui
l’engagea comme enseignante en son école de théâtre pour enfants,
Florence Heininger qu’elle seconda à l’émission «FaxCulture» et le
dramaturge Jean-Marie Piemme) ont marqué un parcours à la fois
tâtonnant et comme fléché par l’obscure logique des vraies vocations,
où les rejets (telle prof qui la déclara mauvaise comédienne, ou tel
metteur en ondes trouvant sa première pièce «de la m…») font parfois
office de stimulants, autant que le bon accueil (d’un Denis Maillefer
ou d’un Andrea Novicov).
L’écriture, à laquelle Sandra Korol ne toucha d’abord qu’en surface en
qualité de rédactrice d’articles dans la rubrique socio-psycho d’un
magazine, elle y plongea ensuite en un mois de frénésie pour en tirer Soledad,
pièce radiophonique diffusée sur Espace 2 en 2001. Dans la foulée, de
commandes en bourses et autres prix, ateliers et mises en scène, 6
ouvrages de théâtre ont vu le jour, la plupart du temps écrits dans
l’urgence, voire «sous dictée» comme le fut KilomBo. Si le
rendez-vous de la jeune actrice avec la gloire-minute, dans le dernier
film de George Clooney où elle était censée débiter deux paires de
phrases, est resté sans lendemain (la scène ayant été supprimée avant
le tournage…), son rêve d’enfant s’est réalisé avec Fragile
de Laurent Nègre, dans lequel elle tient le rôle de l’amie de la
protagoniste, aux côtés de Marthe Keller. «Lorsque j’ai vu le film
achevé, après une belle expérience humaine et artistique, j’ai ressenti
une joie qui n’avait rien de factice.» Comédienne ou auteur?
D’aucuns voudraient la classer dans une case ou l’autre, mais Sandra
Korol entend vivre la double condition, plus celle de la mise en scène,
ainsi qu’elle l’a assumée avec La femme comme champ de bataille au théâtre genevois du Crève-Cœur.
À l’orée de la trentaine, le talent de Sandra Korol lui ouvre de vastes
horizons, où le roman devrait également cristalliser bientôt les thèmes
qui la hantent: la mémoire, le lien, la filiation – cela même
qu’illustrent ses pièces à découvrir ces prochains temps et plus
précisément, après KilomBo: Salida en mai, au Poche de Genève.
«Salida
signifie à la fois la sortie et la mort, la fuite du père qui m’a
offert ma bi-nationalité, l’exil, mais aussi le premier pas dans la
danse et la renaissance, pour moi qui n’ai pas eu à fuir tout en
restant imprégnée de la réalité du déracinement»…
Madame Socrate au dépotoir
On pense à Beckett en lisant KilomBo, non tant pour l’écriture que du
fait de la situation dans laquelle se trouvent ses deux personnages:
reclus dans un souterrain rempli de détritus que ne cesse de cracher un
énorme vide-ordures. De quoi rappeler la « journée divine » de Winnie
et Willie dans Oh les beaux jours… Or Sandra Korol affirme n’avoir rien
lu de Beckett, et quelle raison aurions-nous d’en douter ? De fait, sa
pièce instaure, entre Gorda l’adipeuse aînée qui en sait un bout sur la
haine sévissant en surface, et Nena la plus jeune aspirant à sortir de
ce trou pour connaître enfin l’Amour, une relation initiatique très
particulière où cruauté et tendresse se mêlent. Comme chez Beckett ou
Pinget, l’horreur (Gorda et Nena ayant pour tâche de bouffer les
déchets du monde d’en haut) est en effet exorcisée par le rire, dans un
registre grinçant tout personnel qui va de pair avec le lyrisme d’une
langue superbe.
JEAN-LOUIS KUFFER, 24 Heures
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KilomBo, l’amour invisible
Vidy-Lausanne
– Sandra Korol affirme son talent de dramaturge avec une pièce dont
Nathalie Lannuzel signe la mise en scène. Grinçant.
Après la publication dans la nouvelle collection Enjeux de l’éditeur romand Bernard Campiche avec trois autres pièces de théâtre, voici la création scénique: KilomBo de Sandra Korol est à découvrir à Vidy-Lausanne où les comédiennes Jane Friedrich et Valeria Bertolotto lui donnent chair.
«L’histoire se déroule sous terre, dans une déchetterie exiguë. Elle
dure aussi longtemps qu’on le souhaite», indiquait l’auteure en
préambule. Sandra Korol a laissé Nathalie Lannuzel, choisie par le
théâtre, créer librement sa mise en scène. «Je n’ai pas voulu assister
aux répétitions», dit-elle.
Dans KilomBo,
il y a le parcours personnel de Sandra Korol. Née en 1975 de mère
suissesse et de père argentin aux origines russes, elle obtient son bac
au collège Sainte-Croix de Fribourg puis étudie notamment la
philosophie à l’Université de la même ville. Puis choisit le théâtre au
Conservatoire de Lausanne, dont elle sort diplômée en 1999.
Depuis elle joue (au théâtre et au cinéma), met en scène, écrit… et remporte des prix. Comme celui de Textes en scène, qui verra sa pièce Salida créée en mai prochain au Poche de Genève, KilomBo
a été écrite en 2003 à Buenos Aires, où Sandra Korol retrouvait une
partie de ses racines. Elle y a vu des misérables «cartoneros»,
individus ou familles entières, ramasser des cartons pour les revendre.
En espérant des jours meilleurs… Elle y a entendu le mot «quillon» qui
signifie pagaille, chaos.
Ainsi les deux personnages de KilomBo,
Gorda – la vieille – et Nena – la jeune – vivent sous terre et
recyclent, en les mangeant, les ordures déversées par le monde d’en
haut qui a sombré dans la violence. Dans un décor oppressant, à la fois
hyperréaliste et métaphorique signé Gilles Lambert, les deux femmes en
haillons attendent l’amour. Il s’appelle KilomBo, l’homme magique
qui a fait sentir à Gorda «l’odeur d’une étoile», avant de disparaître.
C’est pour le même que Nena compte les jours. Le même mirage. Il les
éloigne toutes les deux du lien, vrai celui-ci, qui les unit dans ce
souterrain. Si la mise en scène, en accentuant la couleur sombre et
grinçante de la pièce, étouffe les moments plus drôles de ce
tête-à-tête aux accents beckettiens, la richesse de l’œuvre reste
évidente.
FLORENCE MICHEL, Le Courrier
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Sinueuse sage sanguine
En
huit textes Sandra Korol propose une nouvelle façon de raconter la
folie des hommes. Le festival Février des auteurs a permis d’entendre
cette langue douce-amère à Neuchâtel. Une conteuse lucide.
Dans Cargo 7906,
le personnage écrit avec des sanguines. De la pulpe et du pourpre, du
jus et de l’hémoglobine. On reconnaît dans ce huitième texte de Sandra
Korol les plaies recouvertes d’argile et de sucre glacé que chérit
cette dramaturge originale et prolifique. Le public neuchâtelois a
découvert ce week-end, dans le cadre du festival Février des auteurs,
une manière de sculpter le langage où l’on ressent l’influence des
intrépides guerrières qui l’ont précédée comme Sarah Kane ou Elfriede
Jelinek. Mais qui dessine aussi en creux le portrait d’une trentenaire
ni nihiliste, ni idéaliste, qui fabrique de drôles d’objets scéniques.
Comme si elle trempait dans l’éther son univers doux-amer de Vaudoise
métissée par le tango et la Volga. Elle l’exprime différemment: «Je
plonge mes mains manucurées dans la boue.»
«Ma guerre sainte»
Dans
l’air du temps, Sandra Korol, peut-être… Parce que depuis 2001 ses
textes remplissent des salles prestigieuses comme Vidy et ravissent le
public comme la profession. La Genevoise Françoise Courvoisier qui a
mis en scène Salida en témoigne: «J’aime ses textes pour leur
souffle poétique et leur violence intérieure, leur rythme. Des
partitions musicales avec des qualités concrètes.» Efficace et à
fleur de peau, mais sans faire de concession, elle qui est aussi
comédienne refuse parfois de prendre position ou d’écrire des
chroniques: «Je m’engage profondément dans mon écriture. C’est ma
guerre sainte, je me sens parfois en guerre contre moi-même pendant la
création. Mais je me sens sereine, joyeuse, je ne suis pas révoltée, je
ne me promène pas avec un flingue dans les mains. Parfois les armes
silencieuses de la Suisse m’effrayent, la confusion entre être et
avoir, l’éclosion de la télévision, des magazines people, des gadgets.
De plus en plus jeune, on détruit l’attention des gens. J’ai juste
envie de leur dire «regarde ce qui se passe et tu découvres ce que tu
veux».
Elle loue la vocation des EAT, les écrivains de théâtre de Suisse: «En
tant que mauvaise administratrice j’admire leur travail structurel.
Mais je ne veux appartenir à aucune association d’écrivains. Je
trouverais très bien ma place dans l’association suisse des
végétariens, mais avec les auteurs je patauge. Quand j’écris, je ne me
pose jamais ces questions de public ou du rôle du théâtre que l’on
évoque dans les débats. Je me sens profondément liée à une terre qui
subit la folie des hommes.»
Dans Cargo 7906 elle écrit que «le vrai bonheur vous tombe dessus», et dans KilomBo: «Et l’âme cette conne d’âme, elle est capable d’attendre des siècles assise dans la boue de l’espoir avec des fleurs en toc.»
Miracles infestés
On
pense à Pipilotti Rist et Louise Bourgeois pour cette galaxie de
femmes, d’espace de rêve parfois noyé, broyé, déchiqueté par la force
des molaires. Mais Sandra Korol sait aussi raconter des histoires, vous
emmener dans un univers qui ressemble à la terre, mais qui surprend par
des décalages subtils, des contretemps. Quand le comédien Darius
Khetari s’est raconté pour se fondre dans l’univers de la dramaturge,
elle a d’abord séché: «Il m’a dit qu’il adorait les récits grecs, les
antihéros, la parole directe, les contes, New York et les hamburgers.»
Comme l’encre ne coule pas, elle part en Bretagne chez une amie: «Je me
suis nourrie de gâteaux au chocolat et d’objets ramenés par la mer.» Et
en deux jours, quarante pages apparaissent comme des miracles infestés,
comme des anges ravagés. Le comédien précise ensuite ses besoins, elle
retravaille. «Je coupe tout ce qui peut être joué. Je tisse des textes
à trous que d’autres artisans du théâtre remplissent, c’est la magie de
la vie.»
ALEXANDRE CALDARA, L’Express
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VALéRIE POIRIER
Les Bouches
(Création au Théâtre du Grütli, à Genève, en février 2006)
Dans un petit hôtel de campagne déserté par les visiteurs et au
bord de la faillite, vivent trois femmes; Félicité, la propriétaire de
l’hôtel, Zora, sa fille, et Lili, une pensionnaire.
Trois vies en creux qui s’articulent auteur de l’absence.
Nous sommes à la veille de Pâques. Arrive Arbaze, un voyageur.
En une journée et une nuit, les rêves des femmes vont exploser et se transformer pour laisser chacune face à sa réalité.
Valérie
Poirier est née à Rouen en 1961, elle est de nationalité
franco-algérienne. Après des études de théâtre à Genève et à Bruxelles,
elle travaille régulièrement comme comédienne et metteuse en scène.
Elle a obtenu, pour Les Bouches, le Prix de la Société Suisse des
Auteurs.
Les Bouches
Un
hôtel à flanc de rocher, peut-être. Au loin, des camions fusent à
travers les Alpes, mais ne s’arrêtent pas. Au loin, des voyageurs
paraissent obéir à un ordre de marche. Dans l’hôtel, trois femmes
veillent: elles blanchissent les draps, mettent le couvert, chauffent
la soupe, chassent la toile d’araignée. Jusqu’au jour où débarque
Arbaze, élégant et troublant voyageur. Avec Les Bouches, la
Genevoise Valérie Poirier invite à entrer dans l’intimité de trois
beaux personnages féminins. Actrice de formation, elle ancre ses
dialogues dans le quotidien. Pas d’inflation verbale. Cette efficacité
a valu à la jeune femme un prix de la Société suisse des auteurs, en
2004. Mieux: la pièce a été publiée chez Bernard Campiche dans la
collection Théâtre en camPoche. À l’origine des Bouches, une
commande de Stéphane Guex-Pierre. Aujourd’hui, le metteur en scène
invite à les entendre. Il a enrôlé pour cela un quatuor d’acteurs
sensibles: Anne-Marie Delbart, Isabelle Migraine, Anne-Laure Julien et
Philippe Morand.
ALEXANDRE DEMIDOFF, Le Temps
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Motus et bouches décousues
Valérie Poirier invite à découvrir trois beaux personnages de femmes captifs des brumes.
Un hôtel à flanc de rocher, peut-être. Au loin, des camions fusent à
travers les Alpes, mais ne s’arrêtent pas. Au loin, des voyageurs
paraissent obéir à un ordre de marche: elles blanchissent les draps,
mettent le couvert, chauffent la soupe, chassent la toile d’araignée.
Zora, Lili et Félicité font comme si. Comme si elles n’étaient pas
seules au monde. Comme si un automobiliste aux gants de cuir allait
parquer sa Porsche au pied de la maison. Illusion. Jusqu’au jour où
débarque Arbaze, élégant et troublant voyageur.
Avec Les Bouches,
la Genevoise Valérie Poirier invite à entrer dans l’intimité de trois
beaux personnages féminins. Actrice de formation, elle ancre ses
dialogues dans le quotidien. Pas d’inflation verbale. Mais des
répliques comme à la buanderie, qui disent le souci du moment et
suggèrent en arrière-fond une douleur qui ne passe pas. Cette
efficacité a valu à la jeune femme un prix de la Société Suisse des
Auteurs, en 2004. Mieux: la pièce a été publiée chez Bernard Campiche
dans la collection Théâtre en camPoche.
À l’origine des Bouches,
une commande de Stéphane Guex-Pierre. Aujourd’hui, le metteur en scène
invite à les entendre. Il a enrôlé un quatuor d’acteurs sensibles:
Anne-Marie Delbart, Isabelle Migraine, Anne-Laure Julien et Philippe
Morand. Dans les couloirs d’un hôtel cerné par la brume, l’humanité de
Valérie Poirier aspire au grand air de la vérité, celle qu’un silence
étouffe souvent, qu’une friction entre deux êtres fait éclater dans un
fracas de vaisselle cassée.
ALEXANDRE DEMIDOFF, Le Temps
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MANON PULVER
Au bout du rouleau
Au bout du rouleau est une comédie de l'épuisement, du burn-out
capillaire, où s'effilochent les liens qui relient deux individus – en
l'occurrence deux femmes – à leur image d'elles-mêmes.
La comédie des apparences et de la fuite en avant est ici poussée
jusqu'à son paroxysme peroxydé: deux femmes expriment leur ratage
personnel dans un dialogue destructeur et burlesque à la fois, entre
désir de manipuler et besoin de confesser…
Manon Pulver – Née
à Genève en 1965, originaire de Berne avec des ascendances
franco-allemandes et anglaises. Dramaturge et auteure, elle a travaillé
en Suisse et à l'étranger, principalement au théâtre mais aussi à
l'opéra et à la télévision. Elle a également travaillé pour la
radio et pour différents médias, toujours dans le domaine culturel.
Elle est depuis 2002 collaboratrice artistique à la Comédie de Genève.
Elle a écrit plusieurs textes qui ont été lus ou représentés, ainsi Augustine de Villeblanche ou le bal contrarié d'après Sade, mise en scène V. Llodra, 1994, L’'Étang salé ou On ne s'en sortira pas vivants, 1995 mise en lecture G. Guhl, Joyeux Noël, 1998 et 2001 mise en scène G.Guhl, Pour une Absente, mise en scène G. Guhl, 2001, Les surprises de l'intermittence ou les pré-joués convaincus, d'après Marivaux, mise en scène A.Steiger 2005, Au bout du rouleau, mise en lecture André Steiger 2005.
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PASCAL REBETEZ
Les mots savent pas dire
(Création le 24 octobre 2005, Le Poche Genève, Théâtre en Vieille-Ville.)
En 1971,
dans les Pyrénées françaises, un paysan et sa sœur enterrent leur mère
morte sous le plancher de leur maison. Pendant cinq mois, dans un
isolement absolu n’exceptant que sa sœur Paule, Jeannot gravera sur le
parquet de chêne d’environ cinq mètres sur deux une cascade de mots,
une incantation furieuse défiant toutes les règles de la littérature.
De ce fait divers est resté Le Plancher de Jeannot, œuvre d’art brut parmi les plus singulières, dont s’est inspiré l’auteur.
La
pièce induit un huis-clos délirant et inexorable. Il y a Jeannot obsédé
par sa mission de redresseur de torts et de mots, une sorte de Don
Quichotte pris dans la meule de l’Histoire. Il y a Paule, victime
expiatoire, déchet des secrets de famille. La Mère, la disparue,
s’offre en apparition sublimée alors que Béridier fait le relais entre
ce chaudron tragique et la trop étale réalité.
Avec une courte notice de Lucienne Peiry, directrice de la Collection de l'Art brut, à Lausanne.
Pascal Rebetez – Né à Delémont dans le Jura suisse le 11 janvier 1956.
Après une formation de comédien à l’ESAD à Genève, il joue dans des
spectacles off de Suisse romande puis en réalise dans les années
quatre-vingt, soit en tant qu’auteur (Marie Coquelicot, Chronique d’une vie recluse, Le Meilleur du Monde) soit en tant que metteur en scène: Vie et Mort du Cornette Christoph Rilke, Tremblement de terre à Santiago, etc.
Il devient ensuite journaliste, d’abord en radio avant de travailler à
la Télévision Suisse Romande pour les magazines culturels et de société.
Parallèlement, il crée la revue puis les Éditions d’autre part qu’il dirige toujours.
Il est aussi l’auteur d’une dizaine d’ouvrages de poésie, romans et nouvelles.
Bibliographie:
Les Ablutions de Paul-Albert, chroniques, Canevas Éditeur, Saint-Imier, 1989
Le Meilleur du Monde, théâtre, Éditions de l'Aire, Vevey, 1992
L'amour borgne, récit, Canevas Éditeur, Frasne; Saint-Imier, 1995
Duolithique, poésie, photographies d'A. Humerose, Éditions d'autre part, Delémont,1997
La route étroite du lierre, poésie, Éditions d'autre part, Delémont, 1997
Le Magasin pittoresque, récit, Éditions de l'Hèbe, Grolley, 1998
La Mort de Gob, récit, Éditions Le Temps des Cerises, Collection Commune,1999
En pure perte, nouvelles, Éditions de l'Hèbe, Grolley, 2000
Calendrier des sèves, poésie, avec des peintures de L. Félix, Éd. d'autre part, Delémont, 2001
Passions, poésie, Éditions de l’Aire, 2003.
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«Parce
qu’il y a plus de dynamisme chez les dramaturges que chez les
romanciers de la région», Bernard Campiche publie le premier volume de
la collection Enjeux réunissant quatre pièces romandes. On y découvre KilomBo,
le dernier-né de Sandra Korol, trente ans, un regard à la fois tendre
et féroce sur la brutalité des hommes porté par deux femmes
prisonnières d’une fosse à ordures. Mêlant sa sensibilité de comédienne
à une conscience féminine déjà révélée dans l’écriture d’Un temps pour tout, joué par la compagnie Vitriol, la pièce a su séduire le Théâtre de Vidy qui l’accueillera en mars prochain. Enjeux, c’est aussi, notamment, la redécouverte sur papier de la pièce Les mots savent pas dire, de Pascal Rebetez, qui a fait dernièrement salle comble au Poche à Genève.
PHILIPPE MARTHALER, Le
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«Cette
nouvelle collection de textes de théâtre contemporains suisses, très
bien présentée, est l’occasion de suivre de près le travail de nos
auteurs, et de découvrir notamment deux pièces récentes qui ont fait
l’objet d’une mise en scène.
KilomBo, de Sandra
Korol, à voir bientôt à Vidy, nous révèle une écriture qui rappelle
Beckett, avec sa touche et sa vision personnelles, tandis que Les mots savent pas dire de Pascal Rebetez, créée au Poche-Genève, nous font pénétrer dans un univers «brut» fascinant.»
FRANÇOIS MARIN, «Mon choix», 24 Heures
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